Homélie pour le 50° Anniversaire de la Profession Religieuse
ROME, Italie - Lors de la célébration de son 50e anniversaire de profession religieuse, célébrée dans l'église S. Maria delle Grazie alle Fornaci à Rome le 19 octobre 2023, le P. Pier Luigi NAVA, SMM a prononcé l'homélie en présence du Préfet du Dicastère pour la Vie Consacrée et nombreux collègues.
« Misericordias Domini in Aeternum narrabo » (Ps 89). Je me suis permis une variante qui me convenait davantage. Le pluriel a toujours retenu mon attention et ma réflexion : miséricordias. Cinquante ans sont un récit de miséricorde, ponctué de visages, de rencontres, d'amitiés, d'expériences significatives et d'autres moins, récit de miséricordes, don de la Miséricorde de Dieu, depuis son origine dans la vocation à la Compagnie de Marie. Miséricorde dont je suis toujours un mendiant : je la ressens encore plus après cinquante ans où le décompte des jours est un compte à peine positif, car en plus des pertes indéniables, s'accumulent les occasions manquées d'accéder à la sagesse du cœur.
Je lis l'expression bien connue – professio in manibus – avant tout comme une profession entre les mains de la Miséricorde de Dieu, des mains qui nous tiennent la main en signe d'affection et de bienvenue. J'ai pu constater combien ma fidélité n'est rien d'autre qu'un don de Sa Miséricorde, sinon je répète avec conviction un vers cher à l'École française de spiritualité et à mon Fondateur : sans moi nous ne pouvons rien faire ! (Jn 15,5). Je pense que c'est exactement comme ça que ça s'est passé.
In Aeternum. Nous sommes des voyageurs vers l'Éternel. Image évoquée à plusieurs reprises par saint Louis-Marie, elle fait fondamentalement référence au thème du « quaerere Deum », de la recherche de Dieu. Je n'ai jamais été un grand marcheur - sauf pendant les années de ma formation initiale - mais j’ai aussi parcouru certains chemins, à sa recherche et à la fin j'ai compris que ce n'était pas moi qui cherchais, mais j'ai été trouvé. Ça me convenait. Sinon, je me serais déjà perdu. Le verset bien connu de l'Apôtre Paul, « le temps est court désormais » (1 Cor 7,29), d'autres le traduisent par « le temps qui reste ». Ça me convainc davantage, au moins ça ne fait pas perdre de temps !
Tibi servire libertas (VD 170). La liberté de vous servir et, en même temps, la liberté qui vient du service du Seigneur. Sans aucun doute une grâce. Montfort place la grâce de la liberté dans la confiance de notre fidélité au Seigneur à Marie. Le sens élevé de la formule bien connue de « Consécration à Jésus-Christ, Sagesse éternelle et incarnée par les mains de Marie ». Liberté inhérente à la vocation à la mission de la Compagnie de Marie. La cadence rythmique de l'invocation Liberos (enfants/libres) de la Prière Embrasée. Liberté qui s'entend comme disponibilité et aussi comme détachement. Le détachement apostolique, comme l'appelle le Fondateur. Surmonter l'encombrement de l'ego pour faire place au Mystère, même des « choses » qui deviennent du lest dans nos vies. Saint Louis Marie a inventé une expression d'inspiration mystique incontestable : Marie milieu mystérieux. Marie est l'espace qui détient le Mystère. Nous réalisons trop tard combien, dans le détachement, nous risquons notre liberté en nous donnant au Seigneur, c'est-à-dire en nous ouvrant au don du Mystère. Même dans ce cas – malheureusement – ce sont des leçons qui s’apprennent après le temps maximum. Au moins pour moi.
Dans cette perspective – garder le mystère et être gardé par le Mystère – il m'est cher à cette occasion d'évoquer une ancienne coutume de la Compagnie remontant aux environs du milieu du XIXème siècle. Les noms des nouveaux profès étaient déposés dans un cœur de laiton doré qui s'ouvrait comme un écrin. Le monogramme marial gravé au-dessus rappelait le titre de Marie Reine des Cœurs. Le cœur est la symbolique par excellence de l'école française de spiritualité et de notre Fondateur. Cérémonie simple et évocatrice : les noms des nouveaux profès étaient conservés dans le cœur de Marie et le cœur était mis comme un collier autour du cou de la statue de la Vierge. Le "saint dessein" - expression bien connue des anciennes sources monastiques - c'est-à-dire que notre fidélité dans la persévérance a été confiée au Cœur de Marie, gage de notre persévérance dans la fidélité. Rien de dévotionnel ou de sentimental. Cela était pris au sérieux comme un signe d’affection filiale. J'espère et je prie pour que la BVM Reine des Cœurs, puisse encore garder mon nom dans son Cœur. Deo gratias et Mariae!
P. Pier Luigi NAVA, SMM
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