Le Scolasticat d’Haïti en déplacement á cause de l’insécurité
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PORT-AU-PRINCE, Haïti - L’insécurité grandissante qui affecte tous les secteurs du pays et provoque des déplacements massifs de population a aussi un grand impact sur le bon fonctionnement du scolasticat des Missionnaires montfortains en Haïti. Beaucoup de zones à Port-au-Prince sont déclarées zones de non-droit ou territoires perdus où des milliers de femmes, d’enfants et d’hommes quittent de force leurs foyers pour échapper á la violence et aux pillages. La plaine du cul-de-sac notamment Bon repos où se trouve le scolasticat en fait partie. Elle devient une zone difficile d’accès et dépeuplée á cause des affrontements des groupes armés. Cette situation entraine une migration interne où les gens fuient leurs quartiers á d’autres plus paisible et sécuritaire. Le scolasticat des Montfortains n’en est pas épargné.
En effet, depuis le 1er octobre 2023, pour échapper aux violences des gangs armés et sous la demande du Provincial, le Père Jean-Jacques SAINT LOUIS, SMM, les dix-sept (17) scolastiques et leur responsable, le P. Lanès PHANOR, SMM ont abandonné la maison du Scolasticat pour se loger actuellement dans une maison appartenue aux Sœurs de Sainte Union dans la Paroisse de saint Louis Marie de Montfort. Nous sommes arrivés en fuyant les tirs nourris et en empruntant des raccourcis. Nous avons été accueillis par le père Roland VILFORT, SMM et, depuis déjà des mois, nous sommes logés dans cette nouvelle maison avec des bons et mauvais côtés, des avantages et inconvénients, des hauts et des bas. L’important est que nous avons une certaine quiétude d’esprit pour prier, étudier et faire l’apostolat de la charité.
Comment est le fonctionnement du scolasticat dans cette nouvelle réalité ? Pour combien de temps le scolasticat sera-t-il logé dans cette maison ? Quel sera l’avenir du scolasticat en plaine ?
De telles questions nous préoccupent, nous interpellent dans ce contexte d’insécurité généralisée dans le pays, et nous plongent dans une profonde réflexion communautaire.
Pour ce qui est du fonctionnement du scolasticat dans cette nouvelle réalité, il faut dire que depuis notre arrivée dans cette nouvelle maison nous essayons de nous accommoder tant bien que mal même si toutes les conditions ne sont pas réunies. En effet, la maison hôte n’a pas été construite pour accueillir toutes ces personnes. Donc, il n’y a pas suffisamment de chambres et de commodité. Nous sommes obligés de mettre deux scolastiques par chambre. Il n’y a pas non plus suffisamment de douches et de toilettes. Il n’y a pas de bibliothèque. La salle utilisée comme chapelle est à la fois le salon, la salle d’étude, de rencontre communautaire et de détente. Le réfectoire est aussi très restreint par rapport à la quantité de scolastiques.
En outre, il y a beaucoup de va et vient dans la cour de cette maison. Il y a au moins quatre autres personnes qui ne sont pas scolastiques mais qui partagent cette cour avec nous. Cela crée un manque d’intimité et affecte le bon fonctionnement du scolasticat. Ajoutés á tout cela les bruits des marchands, des voitures et des discothèques de la zone qui nous dérangent dans nos heures de prière. Toutefois, en dépit de ces inconvénients et difficultés que nous rencontrons, nous reconnaissons que notre présence dans cette maison est l’œuvre de la providence de Dieu et nous lui rendons grâce pour sa bonté manifestée à notre égard dans ces moments d’épreuves.
Si d’un côté nous rencontrons des difficultés mais d’un autre côté nous devons reconnaitre aussi les avantages que cette maison nous apporte. Grâce à notre présence dans cette maison, les scolastiques arrivent plus tôt au cours contrairement lorsqu’ils étaient en plaine. Il y a moins d’embouteillage et moins de fatigue. Ils ont plus de temps pour se reposer et pour étudier. Cependant, si nous devons rester pendant longtemps dans cette maison, il faudrait qu’il y ait des changements notamment : 1) faire sortir les gens qui sont sur la cour pour donner plus d’intimité aux scolastiques ; 2) envisager plus de chambres, de douches et de toilettes pour accueillir le nombre de scolastiques qui grandit de plus en plus chaque année. Il y a 17 scolastiques cette année. Ils seront probablement 21, l’année prochaine. Si rien n’est fait à temps il sera encore plus difficile voire impossible de les y loger tous. C’est pourquoi il est important de commencer par réfléchir dès maintenant pour anticiper l’avenir, de prendre les mesures nécessaires et prévoir un plan B pour l’année prochaine.
Pour ce qui à trait à la question relative à la durée de temps du scolasticat dans cette nouvelle maison, nous ne savons pas encore. Nous disons cela parce que la situation s’aggrave davantage chaque jour. Les gangs armés règnent en maitres et terrorisent la population. La paix ne revient pas totalement dans la zone de la plaine. Certes, il y a un calme apparent pour le moment mais il y a toujours des tirs et l’insécurité bat son plein. Donc il y a encore beaucoup d’incertitudes et d’inquiétudes quant á notre retour prochain au scolasticat en plaine. D’où la nécessité pour les responsables de penser á l’avenir du scolasticat en plaine. Faut-il toujours le garder au même endroit ou non, ou bien envisager un autre espace ?
Pour ce qui concerne l’avenir du scolasticat en plaine, il faudrait regarder la réalité de plus près. Avec l’insécurité grandissante dans la zone, garder le scolasticat en plaine demande un bon discernement et une capacité d’observation pour une meilleure planification de l’avenir. Certes la maison a été construite avec plus ou moins une structure pour la formation mais, tenant compte de la conjoncture actuelle avec les gangs armés qui élargissent chaque jour leur territoire, s’il n’y a aucun changement á l’avenir il faudrait voir les choses autrement. La réalité nous invite donc á lire les signes des temps, à voir, juger et agir.
La vigilance et prudence dans la foi
C’est vrai que nous faisons confiance au Seigneur et nous prions toujours pour qu’il nous vienne en aide mais c’est aussi Lui qui nous dit de veiller et d’être prudents. Nous ne savons ni le jour, ni l’heure où les voleurs viendront percer et piller notre maison car, non loin de chez nous, ils en envahissent déjà d’autres, les pillent et les transforment en leur propre base. C’est pourquoi nous sommes vigilants et prudents.
Depuis notre départ, nous avons sur place un gardien qui prend soin de la cour et de la maison. Moi, P. Lanès, accompagné de quelques scolastiques, je descends le dimanche, quand il y a du passage, pour célébrer la messe avec le peuple de Dieu rassemblé dans notre chapelle Notre Dame du Rosaire. C’est notre façon d’oser prendre des risques pour Dieu et pour l’humanité comme nous a demandés le Chapitre général de mai 2023. C’est un témoignage de foi, de courage et d’espérance qui dit que tout n’est pas fini malgré les nombreux défis. Certes, les temps sont difficiles, l’heure est grave, vivre en Haïti aujourd’hui nous expose à beaucoup de risques mais c’est dans ce contexte de risque que nous sommes invités à témoigner du Christ et former les futurs pasteurs pour l’Église en Haïti.
Puisse Dieu, par l’intercession de la Vierge Marie, Notre Dame du Perpétuel secours, continuer de veiller et de protéger notre pays afin que la paix et la sécurité deviennent une réalité dans notre Haïti chérie.
P. Lanès PHANOR, SMM
Recteur du Scolasticat
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