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Besnard 05 pp 267-328

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LIVRE CINQUIEME
 
111 ‑ M. de Montfort revient à La Rochelle
 
Le seul désir de procurer la gloire de Dieu et le salut des âmes avait fait passer M. de Montfort du diocèse de La Rochelle dans celui de Luçon. Le même motif le fit retourner auprès d'un prélat dont l'estime et la confiance pouvaient mieux seconder ses travaux. M. de la Rochelle vit avec bien du plaisir[1] son cher Missionnaire rentrer dans sa ville. Jusque-là il n'avait point eu de demeure à lui où il put se retirer dans les intervalles de ses excursions évangéliques. Une personne pieuse pensa à lui en procurer une, sa vie durant.
 
C'était une maison avec un petit jardin entouré de murs, située presque aux portes de la ville dans le canton de Saint-Eloi, qui fut, dès lors et pendant qu'il vécut, nommé le petit ermitage de Saint-Eloi. Plusieurs particuliers s'offrirent à l'envi à lui fournir un ameublement convenable et commode ; mais il n’en voulut jamais[2] d'autre que celui du prophète, c'est-à-dire : une table, une chaise, et un chandelier, regardant tout le reste comme superflu. Ce qui lui fit le plus de plaisir ce fut d'apprendre que, depuis son départ, Dieu n'avait cessé de répandre ses bénédictions sur les missions qu'il avait données l'année précédente. Il trouva[3] les esprits et les cœurs dans des dispositions admirables. Les semences de pénitence qu'il y avait jetées avaient germé et fructifié au centuple. Les impressions en subsistaient dans toute leur vivacité. Ce fut pour les affermir de plus en plus, qu'ayant consenti à donner la retraite aux hospitalières, il voulut que tout le monde y fût admis[4]. A peine eut-il paru en chaire qu'on y vint de tous les cantons de la ville avec un empressement et un concours extraordinaires. Outre les discours sur toutes les matières de morale qu'il donnait au publie, il faisait aux religieuses des exhortations particulières, où après leur avoir prouvé /98/ que le salut et la perfection étaient pour elles deux choses inséparables, il leur expliquait les avantagés et la sublimité de leur état d'hospitalières. Les pauvres malades n'eurent pas moins de part à l'activité de son zèle. Il se rendait assidûment auprès de ceux qui ne pouvaient pas assister à ses sermons, il leur apprenait à souffrir en pénitents et à mourir en saints.
 
112 ‑ La gageure de Mademoiselle Pagé
 
Mais tandis que la parole de Dieu se répandait de sa bouche comme une douce rosée sur les terres bien disposées à la recevoir, elle savait, comme un tonnerre, atterrer les âmes superbes et briser les cœurs endurcis. Une demoiselle engagée bien avant dans les amusements[5] et les vanités du monde, se trouvant dans une partie de plaisir avec une troupe de dames et d'officiers, fit complot avec sa compagnie d'aller entendre M. de Montfort pour se moquer du bon missionnaire, et même dans le dessein de lui causer quelques distractions capables de lui faire perdre la suite et le fil de son discours. Pour cet effet, elle s'ajusta le plus mondainement[6] qu'elle put, et alla se placer au milieu de l'église sous les yeux du prédicateur. Tout le monde s'attendait[7] qu'il allait lui faire quelque morale[8]. Elle s'y attendait elle-même, mais il ne lui dit rien. On remarqua seulement qu'il jeta un regard de compassion sur cette fille mondaine. Ensuite, il se tourna vers le saint sacrement, fit sa prière et commença son sermon. Il prêcha avec tant de force et d'onction qu'il fit fondre tout l'auditoire en larmes. On en vit aussi couler des yeux de mademoiselle Pagé, car on peut la nommer en cet endroit[9] que commence sa pénitence, qui rendra sa mémoire immortelle. Après la bénédiction elle resta dans l'église. La compagnie qu'elle avait amenée l'envoya chercher elle lui donna tout le temps de s'impatienter à la porte[10] et ne partit pas de sa place. Quand tout le monde fut retiré, elle sort avec une fille qui était à son service, lui demande[11] la demeure de M. de Montfort et lui dit[12] de l'y accompagner. Elle eut[13] avec lui une conversation qui dura bien deux heures, après quoi elle rentra chez elle. Le projet qu'elle méditait demandait une prompte exécution. Elle se met aussitôt à régler ses affaires. /99/ Elle y passa toute la nuit, et dès le lendemain elle alla chez les dames de sainte Claire pour demander à y être reçue[14] en pension. Elle y entra le même jour.
 
M. de Montfort lui fit faire une confession générale. Elle employa huit jours à la faire ; après quoi elle demanda à l'abbesse de la recevoir au nombre des religieuses. L'abbesse[15] fort étonnée, lui ayant fait les représentations qu'elle jugeait convenables, «Madame, lui répondit-elle, mon choix est fait, mais j'ai deux grâces à vous demander. La première de n'être jamais dans les charges, la seconde de n'aller jamais au parloir que dans une pressante nécessité.» On promit ce que l'on put promettre et la postulante fut admise. Il serait difficile de dire quel orage excita une démarche si inattendue. On mit tout en œuvre pour la faire échouer. On en vint jusqu'à menacer de mettre le feu au monastère. M. de Montfort essuya une bonne partie de la persécution, mais sa vertueuse pénitente, connue dans la suite, sous le nom de sœur Saint Louis, demeura ferme dans sa vocation, en remplit les devoirs avec une ferveur marquée[16] au prodige de grâce qui l'avait appelée et mourut en odeur de sainteté dans le lieu de son sacrifice. Si sa conversion excita du bruit et des murmures, elle n'en fut pas moins un sujet d'édification pour toute la ville. Plusieurs demoiselles suivirent son exemple et se firent religieuses en différents monastères. On ne parlait à La Rochelle que de mademoiselle Pagé[17] et de son saint directeur. Il vit un grand nombre de personnes de tout sexe se mettre sous sa conduite. C'était afficher une réforme entière que de se confesser seulement à lui. Une courte exhortation, une simple parole sortie de sa bouche achevaient ce que ses discours[18] publics et une haute idée de sa vertu[19] avaient commencé.
 
113 ‑ L'Association des Sœurs de la Croix
 
En travaillant[20] avec tant de succès à la conversion des pécheurs, il ne négligeait pas le soin de plusieurs personnes qui menaient déjà au milieu même de la corruption du monde une vie réglée et édifiante. Il cultivait leurs saintes dispositions ; il entrait dans leurs vues, et leur proposait les siennes pour tout ce qui pouvait contribuer à leur avancement dans la vertu. C'était dans cet esprit qu'il avait déjà établi en plusieurs endroits[21], avec /100/ l'agrément et sous l'autorité des évêques, différentes associations en l’honneur de la Croix[22], comme des amis de la Croix, des confrères, des sœurs de la Croix. Il leur donnait des règlements et des pratiques très sages qu'il faisait approuver par les ordinaires. Il engageait ensuite le curé ou quelque autre ecclésiastique, de son consentement, à les faire observer. Celle qu'il établit à La Rochelle, sous le titre de soeurs de la Croix, s'y est toujours soutenue avec beaucoup d'édification, et n'a rien ralenti de la ferveur primitive que lui avait inspiré son saint instituteur. Mais ce qu'il avait le plus à cœur[23], c'était de travailler au salut des pauvres habitants de la campagne[24]. Il pensait même à éterniser les effets de son zèle et de sa charité pour eux. Il se rappelait[25] avec quelle prédilection Jésus-Christ s'attacha à leur prêcher son évangile ; que dès le moment de sa naissance il les avait appelés à lui pour être ses premiers adorateurs ; que dans le cours de sa vie active à ne se montra que par intervalle à Jérusalem, et qu’on le vit presque uniquement occupé à parcourir les bourgs et les villages de la Judée ; que si les ministres évangéliques ont doublement à travailler quand il s'agit de dissiper l'ignorance et de déraciner les vices d'un peuple grossier, ils ont au moins la consolation de savoir qu'ils édifient sur le fondement de la foi, et qu'ils n'ont pas besoin de prouver la vérité du christianisme pour en faire pratiquer les maximes et la morale.
 
114 ‑ Motif de fondation de la Compagnie de Marie
 
Le saint homme jetait souvent les yeux sur cette portion du troupeau de Jésus-Christ, la plus nombreuse et la plus délaissée. Non content, de supplier le Père de famille d'envoyer des ouvriers dans une si abondante moisson, il s'occupait du dessein[26] d'en former lui-même. D'autres l'avaient conçu et exécuté avant lui, et les bénédictions que Dieu y avait répandues lui donnaient encore plus de confiance pour se promettre[27] que le succès couronnerait son entreprise. Il en traça le plan sur la connaissance[28] qu'il avait des mœurs, du caractère et du goût des gens de la campagne. Il s'y était réglé lui-même pour préparer la plupart de ses sermons, pour la composition de ses cantiques, pour sa manière de vivre et de converser au milieu du bon peuple, pour les spectacles de religion qui faisaient et qui font encore /101/ aujourd'hui une sensation si frappante. Il ne lui manquait plus que de trouver un nombre de dignes prêtres[29] qu'il pût faire entrer dans ses vues et qui voulussent partager[30] ses travaux. Il s'en associa quelques-uns et donna naissance à la Société des Missionnaires de la Compagnie de Marie, dont les premiers, ayant[31] appris de lui-même la méthode[32] la plus sûre et la plus efficace, pour remplir avec fruit cette fonction apostolique Pont transmise à leurs successeurs.
 
115 ‑ Le Séminaire du Saint-Esprit à Paris
 
Pour mieux affermir sa nouvelle Congrégation, il crut devoir lui assurer l'intime et sainte relation qu'il avait lui-même depuis longtemps[33] avec Messieurs de la Communauté[34] du Saint-Esprit à Paris. Nous ne paraitrons donc point[35] nous écarter de notre sujet en parlant ici[36] de cette célèbre maison et de son respectable instituteur avec qui M. de Montfort était intimement uni. Nous le devons d'ailleurs à l'amitié et à la reconnaissance.
 
Messire Claude-François Poullard des Places, à qui le séminaire du Saint-Esprit doit son établissement[37], était originaire d'une très ancienne maison de Bretagne, diocèse de Saint-Brieuc. E naquit à Rennes le 27 février 1679, sur la paroisse de Saint-Pierre en Saint-Georges, et y fut baptisé le même jour. Sa mère le consacra d'abord à la sainte Vierge, et lui fit porter le blanc en son honneur jusqu'à l'âge de sept ans. Il étudia les humanités, et la philosophie au collège de Rennes. Ce fut là qu'il forma une étroite liaison avec M. de Montfort. Ils concertèrent ensemble de faire avec quelques-uns de leurs condisciples une petite association pour honorer spécialement la très sainte Vierge. Ils s'assemblaient à certains jours, dans une chambre qu'une personne de piété leur avait prêtée.
 
Ils y dressèrent une espèce d'oratoire pour y faire leurs exercices, et contribuaient à frais communs à ce qui était nécessaire pour sa décoration. Ils avaient leurs règles pour la prière, le silence et la mortification qui allait quelquefois jusqu'à la discipline. Cette sainte assemblée subsista encore quelque temps après le départ de M. Grignion[38] pour Paris, par le zèle et les soins du jeune Desplaces à qui il l'avait recommandée, et qui en demeura seul l'âme et le soutien. Cependant comme les vues que sa famille avait sur lui demandaient qu'il se produisît dans le monde, il s'y livra, et peut-être un peu trop. Sa passion /102/ dominante fut d'y briller, et il faut avouer qu'il avait tout ce qu'on peut désirer pour paraître avec distinction. Monsieur son père résolut d'en faire un conseiller au Parlement de Bretagne, et Madame Desplaces doutait si peu des dispositions de son fils que déjà elle avait fait la dépense d'une robe de palais. Le moment où il voulut l'essayer fut celui qui le dégoûta de la magistrature. Il s'approcha d'un grand miroir, et tandis qu'il se contemplait revêtu du manteau de Thémis, il pensa apparemment que l'essentiel était d'en bien tenir la balance, qu'il ne devait pas monter sur les tribunaux pour y faire parade de la pourpre, qu'il ne devait pas être, ce qu'il voyait dans la glace, un magistrat en représentation et qu'il n'était pas aussi aisé de se revêtir des qualités d'un juge que d'en prendre la robe. Quoi qu'il en soit, Dieu l'éclaira[39] d'une lumière vive qui lui fit connaître qu'il ne l'appelait pas à cet état. Il quitta sa robe et déclara hautement qu'il ne la reprendrait jamais. En même temps il demanda à son père la permission d'aller étudier en Sorbonne et d'entrer dans l'état ecclésiastique. Ce début fut un coup de foudre pour ce respectable officier[40], n'ayant que ce fils qui pût perpétuer son nom et posséder sa charge. Il n'oublia rien pour le détourner de son dessein ; mais le jeune homme demeura inflexible et sa famille ne s'opposa plus à une vocation si marquée.
 
Arrivé à Paris, il entra au collège de Clermont et commença par une retraite le nouveau plan de vie qu'il allait se former. Il le médita à loisir, et s'y affermit ensuite par l'exercice assidu de l'oraison et la fréquentation des sacrements. La lecture de la vie de M. Le Nobletz prêtre missionnaire, mort en odeur de sainteté en Bretagne, ne lui fut pas d'un petit secours pour mépriser le monde et se mettre en tout au-dessus du respect humain. Sa ferveur répondit toujours à ses résolutions. Ses mortifications surtout étaient si austères que son confesseur était souvent obligé d'en modérer les pieux excès. Dès lors, il consacra ses épargnes, et une partie de son nécessaire à fournir à quelques pauvres écoliers le moyen de poursuivre leurs études, jusque-là qu'il donnait chaque jour la moitié de sa portion à l'un d'entre eux qui demeurait /103/ à la porte du collège. C'est ainsi qu'il préludait à ce qu'il devait faire en peu avec un zèle dont les fruits subsistent encore aujourd'hui. L'union étroite[41] qui s'était formée à Rennes entre lui et M. Grignion[42], bien loin de s'être ralentie par le laps de temps, recevait chaque jour de nouveaux accroissements, et l'on peut dire que la conformité de leurs sentiments[43] et de leur vie annonçait déjà[44] que le ciel les avait spécialement choisis[45] pour travailler de concert à la conquête des âmes. Ils se communiquèrent mutuellement leurs vues et leurs projets, mais leur embarras était grand pour se décider sur les moyens d'en remplir toute l'étendue[46]. L'un était né, ce semble[47], avec un attrait dominant pour les emplois de la vie apostolique ; l'autre se sentait attiré à une vie plus sédentaire, même à une entière solitude. Tous deux n'avaient en vue que Dieu seul et sa plus grande gloire. Ils ne cessaient de lui demander de leur faire connaître sa volonté. Prières, communions, jeûnes, macérations, aumônes, tout se faisait dans l'intention d'obtenir du ciel des lumières. Elles furent accordées.
 
M. Desplaces sentit que Dieu voulait se servir de lui pour peupler son sanctuaire et pour former à son peuple des maîtres et des guides. Il comprit encore que, pour y réussir, il ne pouvait rien faire de mieux que de continuer à aider de pauvres écoliers à subsister et à les mettre en état de poursuivre leurs études. Il ne se borna pas à ces secours temporels. Il conçut le dessein de les rassembler dans une chambre, où il irait de temps en temps leur faire des instructions, et de veiller sur eux autant que sa demeure dans le collège pourrait le lui permettre. Il communiqua son projet à son confesseur qui l'approuva. Le principal du collège fit quelque chose de plus, il lui promit de le seconder[48] dans cette bonne œuvre, en lui accordant une partie de ce qui se desservait de dessus la table des pensionnaires, pour aider à la subsistance de ses pauvres écoliers.
 
En ce même temps, M. de Montfort méditait aussi un autre projet[49] digne de son grand cœur. C'était de chercher des ecclésiastiques animés d'un /104/ même esprit et de se les associer pour en former une Compagnie d'hommes apostoliques. Il n'avait point de plus douces pensées que de se considérer servant Dieu et se sanctifiant avec eux en travaillant au salut des âmes dans les missions, et quoiqu'il ne sût encore ni le temps, ni le lieu, ni la manière dont cela devait s'exécuter, il lui semblait que c'était tout ce que Dieu demandait de lui. M. Desplaces fut celui[50] sur qui il jeta les yeux pour l'exécution de son projet. L'ayant été voir, il le lui proposa, et l'invita de s’unir à lui pour être le fondement de cette bonne œuvre. M. Desplaces lui répondit dans la candeur de son âme : «Je ne me sens point d'attrait pour les missions ; mais je connais[51] trop le bien qu'on peut y faire pour ne pas y concourir de toutes mes forces et m'y attacher inviolablement avec vous. Vous savez que depuis quelque temps je distribue tout ce qui est en ma disposition pour aider de pauvres écoliers à poursuivre leurs études. J'en connais plusieurs qui auraient des dispositions admirables et qui, faute de secours, ne peuvent les faire valoir, et sont obligés d'enfouir des talents qui seraient très utiles à l'Eglise S'ils étaient cultivés. C'est à quoi je voudrais m'appliquer en les assemblant dans une même maison. Il me semble que c'est ce que Dieu demande de moi, et j'ai été confirmé dans cette pensée par des personnes éclairées dont quelqu'un m'a fait espérer de m'aider pour pourvoir à leur subsistance. Si Dieu me fait la grâce de réussir, vous pouvez compter sur des missionnaires. Je vous les préparerai et vous les mettrez en exercice. Par ce moyen vous serez satisfait et moi aussi.»
 
Tel fut le résultat de leur entretien et le commencement de cette union et de ce rapport qui a toujours subsisté entre la mission de M. de Montfort et la Communauté de M. Desplaces. La chose résolue, on ne pensa plus de part et d'autre qu'à en venir à l'exécution et à remplir chacun la partie dont on s'était chargé. M. Des­places commença par louer une chambre dans la rue des Cordiers, proche le collège, et y assembla les pauvres écoliers qu'il /105/ assistait déjà auparavant et dont les bonnes dispositions lui étaient connues. Les progrès en tout genre que faisaient ces premiers disciples[52] étaient trop remarquables pour ne pas lui attirer d'autres excellents sujets. Il pensa donc à louer une maison pour qu'on fût[53] plus au large. En peu de temps il s'y forma une communauté d'ecclésiastiques, à qui il donna des règles remplies de sagesse, qu'il fit[54] examiner et approuver par des personnes d'une grande expérience. Lui-même pratiquait le premier ce qu'il recommandait aux autres. Il ne se contentait pas de leur faire souvent[55] des instructions, il avait soin de leur faire donner des retraites par les plus habiles maîtres en ce genre. Il profitait même de toutes les occasions qui se présentaient pour leur procurer quelqu'entretien de piété. Il conduisait à sa communauté ceux de ses amis qui venaient le voir et en qui il reconnaissait le talent de la parole. On pense bien que son plus intime confident[56] ne fut pas oublié. Je tiens de celui qui fut supérieur de cette maison après M. Desplaces, et qui avait été son élève[57], qu'un jour M. Grignion les avait prêchés sur la sagesse, et leur avait fait une très belle paraphrase du livre de l'Ecriture qui en porte le titre.
 
«Je ne parle point, leur dit-il, de cette sagesse, ou prudence des enfants du siècle..., mais je parle de cette sagesse surnaturelle et divine que Salomon désirait avec tant d'ardeur, qu'il demandait avec tant d'instances, et qui lui fût accordée avec tant de profusion. Optavi et venit in me spiritus sapientiae. (Sap. 7, 7). Je parle de cette sagesse de l'évangile qui consiste à s'appauvrir, à se mortifier, à se cacher, à s'apetisser, à s’humilier pour plaire à Dieu... De cette sagesse que Jésus-Christ nous a enseignée par ses paroles et par ses actions, et qui consiste à faire en tout et partout plus d'état de la pauvreté que des richesses ; de la croix et des souffrances que des plaisirs, des joies, des satisfactions de la vie ; des humiliations et des opprobres, que de la gloire, des grandeurs, et de l'élévation. Sagesse si belle qu'elle seule mérite notre amour et notre cœur ; si délicieuse qu'elle nous dédommage abondamment de tous les plaisirs des sens ; si honorable qu'il suffit de l'avoir pour être estimé et respecté des hommes ; si riche et si précieuse qu'au jugement du /106/ Saint-Esprit, elle vaut mieux que tous les biens les plus précieux : melior est sapientia cunctis pretiosissimis. (Proverb. VIII, 11).
 
Sagesse néanmoins si peu connue, et encore moins goûtée des mondains, parce qu'ils ne peuvent concevoir qu'il y ait un vrai bonheur dès cette vie même, et qu'on[58] goûte des joies et des douceurs ineffables à s'appauvrir, à se mortifier, à s'apetisser, à s’humilier pour plaire à Dieu. Voilà pourquoi ils la méprisent, ils la haïssent, ils la décrient, et la traitent de folie et d'extravagance... C'est là ce mystère, où la sagesse humaine ne peut pénétrer et qui n'a été révélé qu'aux petits et aux humbles de cœur : abscondisti h
æ
c a sapientibus et revelasti ea par­vulis.
(Math. XI, 25).» « Il nous fit tous mettre à genoux, m'ajouta M. Boüic,[59] pour faire à Dieu une prière et lui demander cette divine sagesse dont il venait de nous entretenir, et[60] il la fit avec des termes si vifs, avec des traits si animés, des pensées si sublimes qu'il nous semblait entendre parler un ange.»
 
Mais tandis que M. Desplaces se livrait tout entier aux soins qu'exigeait sa communauté naissante, et qu'il s'épuisait d'austérités, il fut attaqué d'une pleurésie jointe à une fièvre continue et à un ténesme violent qui lui causa pendant quatre jours des douleurs extrêmes. Elles ne purent arracher de sa bouche un mot de plainte[61], encore moins d'impatience. On n'apercevait le redoublement de ses souffrances que par les actes de résignation qu'elles lui faisaient produire. La défaillance même de la nature semblait lui prêter de nouvelles forces pour répéter souvent ces paroles du saint roi David : Quam dilecta taber­nacula tua, Domine virtutum, concupiscit et deficitani­ma mea in atria Domini Que vos tabernacles sont aimables, ô Dieu des armées mon âme ne saurait plus soutenir l'ardeur avec laquelle elle soupire après la demeure du Seigneur. (Psal. 83, vv. 2‑3)*
 
Dès qu'on sut à Paris que sa maladie était sérieuse, un grand nombre de personnes distinguées par leur piété et par leurs places vinrent le voir : messieurs les directeurs du séminaire de Saint-Sulpice, de Saint-Nicolas du Char­donnet et de Saint-François de Sales. Le saint homme M. Jourdan, avec qui il était lié d'une étroite amitié, l'envoya aussi visiter de sa part. On lui administra de bonne heure les derniers sacrements, /107/ et après les avoir reçus avec un plein jugement et une parfaite liberté d'esprit, il expira doucement sur les 5 heures du soir le 2 octobre l'an 1709, âgé de 30 ans et 7 mois. Tel fut le saint et célèbre M. Desplaces, instituteur du séminaire du Saint-Esprit à Paris. L'amitié que la conformité de vues, de caractères, de sentiments avait formée entre M. de Montfort et lui, a toujours subsisté entre les successeurs de ces deux grands hommes et leurs élèves. On sait à quoi sont destinés les jeunes ecclésiastiques qu'on rassemble au séminaire du Saint-Esprit. Formés à toutes les fonctions du sacré ministère et à toutes les vertus sacerdotales par les soins, et plus encore par les exemples de leurs sages directeurs[62]. Ils possèdent dans un Souverain degré l'esprit de détachement, de zèle, d'obéissance. Ils se dévouent au service et aux besoins de l'Eglise sans d'autres désirs que de la servir et de lui être utiles[63]. On les voit entre les mains de leurs supérieurs immédiats et au premier signe de leur volonté (toujours sous le bon plaisir des évêques), faire comme un corps de troupes auxiliaires, prêts à se porter partout où il y a à travailler pour le salut des âmes, se dévouant par préférence à l'œuvre des missions, soit étrangères, soit nationales, s'offrant pour aller résider dans les lieux les plus pauvres et les places les plus abandonnées, et pour lesquelles on trouve plus difficilement des sujets. Qu'il faille être relégué[64] dans le fond d'une campagne, ou enseveli dans le coin d'un hôpital, instruire[65] dans un collège, enseigner dans un séminaire ou diriger dans une pauvre communauté, se transporter[66] aux extrémités du royaume ou y continuer une austère résidence, qu'il faille même[67] traverser les mers et aller jusqu'au bout du monde pour gagner une âme à Jésus-Christ, leur devise est : nous voilà prêts à exécuter vos volontés : ecce ego, mitte me (Isa. VI, 8). Enfin cette sainte maison est comme une terre bénite d'où tous les ans on retire de jeunes plantes qui vont produire d'excellents fruits dans les terres pour les-­quelles on les a destinées. Elle nous a souvent fourni pour notre établissement de Saint-Laurent-sur-Sèvre d'excellents sujets, en qui nous avons trouvé toutes les qualités propres à former de zélés[68] missionnaires, et eux-mêmes peuvent rendre témoignage qu'ils n'ont rien vu dans le règlement de M. de Montfort que de parfaitement /108/ conforme aux principes selon[69] lesquels on se conduit à la communauté du Saint-Esprit.
 
116 ‑ La Prière Embrasée
 
Le serviteur de Dieu,[70] dont nous continuons la vie, était tellement occupé de ce grand ouvrage qu'il en avait fait le sujet d'une longue suite d'aspirations saintes, ou plutôt d'une espèce de soliloque qu'il a mis à la tête[71] et dont voici quelques extraits. Après avoir commencé par ces paroles[72] : «Memento Congregationis tu
æ
quem possedisti ab initio.
Souvenez-vous, Seigneur, de votre Congrégation que vous avez possédée de toute éternité en pensant à elle ... », il en fait une petite paraphrase et dit entre autres choses[73] : «Memento : Dieu tout-puissant, souvenez-vous de cette Compagnie en y appliquant la toute-puissance de votre bras qui n'est pas raccourci, pour lui donner le jour et la conduire à sa perfection. Innova signa et immuta mirabilia[74] (Ecclesi. XXXVI, 6) » Ensuite il donne un libre essor à ses pensées et aux mouvements de son cœur, et répétant de temps en temps le premier mot de sa Prière, il dit : «Seigneur Jésus ! Memento Congregationis tu
æ
. Souvenez-vous de donner à votre Mère une nouvelle Compagnie pour renouveler par elle toutes choses et pour finir par Marie les années de la grâce, comme vous les avez commencées par elle... Qu'est-ce que je vous demande ? Rien en ma faveur, tout pour votre gloire... Des hommes selon votre cœur qui, sans propre volonté qui les souille et les arrête, fassent toutes vos volontés, et terrassent tous vos ennemis comme autant de nouveaux David, le bâton de la croix et la fronde du saint rosaire à la main. Des nuées élevées de la terre et pleines de rosée céleste qui sans empêchement volent de tous côtés, selon le souffle du St Esprit. Oui sunt isti‑qui ut[75] nubes volant. (Is. LX, 8) ... Si je n'avais cette espérance[76] que vous exaucerez tôt ou tard ce pauvre pécheur, dans les intérêts de votre gloire... Iste, pauper clamavit et Dominus exaudivit eum, (Psal. XXXIII, 7), je vous prierais absolument avec un prophète : Tolle animam meam. (3 Reg. 19, 4). /109/ Mais la confiance que j'ai en votre miséricorde me fait dire avec un autre prophète : Non moriar, sed vivam et narrabo opera Domini, (Psal. 117, 17) jusqu'à ce que je puisse dire avec Siméon : Nunc dimittis servum tuum in pace, quia viderunt oculi mei. (St Luc II, 29, 30). Memento Congregationis tu
æ
: c'est à vous seul à faire par votre grâce cette assemblée. Si l'homme y met le premier la main, rien ne sera fait. S'il y mêle[77] du sien avec vous, il gâtera tout, il renversera tout. Congregationis tu
æ
 
: c'est votre ouvrage grand Dieu.»
 
Non content d'offrir ses prières et l'adorable sacrifice pour l'accomplissement de cette œuvre si grande et si sainte, à faisait à cette intention des jeûnes, des pèlerinages à quoi il joignait la voix de ses larmes dans ses oraisons, et celle même de son sang dans de cruelles macérations. Enfin ce fut pendant une retraite qu'il se détermina à former incessamment sa nouvelle société, et à lui donner un règlement qui la mit[78] en état de joindre l'étude assidue et réfléchie de la perfection sacerdotale avec les travaux d'un zèle apostolique.
 
Quelques moyens qu'il eût employés pour connaître la volonté de Dieu, il lui restait une voie plus sûre encore pour ne pas s'y méprendre. C'était la voie de l'obéissance. E se proposa de la suivre et commença par soumettre son projet au jugement et à la décision de l'Evêque dans le diocèse duquel il résidait[79]. C'était M. de la Rochelle, prélat aussi éclairé pour le discernement des esprits que porté à soutenir et à favoriser tout ce qui lui paraissait être dicté par l'esprit de Dieu. Il entra parfaitement dans les vues de M. de Montfort, approuva son projet et lui promit de faire tout ce qui dépendrait de lui pour faciliter l'entreprise et en assurer le succès.
 
Le nouvel instituteur[80], affermi plus que jamais par la décision de J'évêque laquelle il regardait[81] comme un oracle du ciel, crut[82] qu'il fallait au plus tôt tracer le plan de l'ouvrage et rédiger le règlement qu'il voulait donner à ses élèves. Mais il voulut auparavant les instruire encore quelque temps /110/ par son exemple dans l'art de donner des missions et remit son ouvrage à la fin de celles qu'il allait commencer.
 
117 ‑ Reprise des missions
 
Elles produisirent des fruits qui surpassèrent ses espérances[83]. Le bruit des conversions frappantes dont nous avons parlé[84] avait tellement prévenu les esprits en sa faveur, que dès qu'on le savait dans[85] quelque paroisse, on y courait de toutes parts pour l'entendre. C'était un spectacle bien touchant de voir même au cœur de l'hiver les habitants des villages les plus éloignés[86] de l'église, abandonner leurs maisons, laisser à peine quelques enfants à la garde du bétail, oublier[87] jusqu'à leur nourriture pour avoir la consolation d'entendre quelques-uns de ses sermons. C'était comme des processions dans les chemins et le concours était si grand que, les églises ne pouvant contenir la multitude, une partie était obligée de rester dehors, sans être pour cela privée du fruit de la divine parole, soit par les efforts que faisait le saint prédicateur pour être entendu, soit parce que ceux-mêmes à qui la voix ne pouvait parvenir[88] se trouvaient également touchés, attendris en voyant[89] les marques extérieures de componction et de douleur dont se sentaient pénétrés[90] ceux qui étaient[91] à portée de l'entendre. Souvent même, à l'exemple des hommes apostoliques qui annoncent l'évangile dans les lieux où il n'y a pas encore de temples élevés au vrai Dieu, il prêchait en pleine campagne. Le peuple d'une pauvre paroisse n'était pas le seul qui lui formât un auditoire. La foule était grossie par un grand nombre[92] de personnes de distinction qui avaient leur domaine dans le lieu, ou dans les paroisses circonvoisines. On les voyait à la fin des exercices se placer à l'endroit où il[93] entendait les confessions, s'approcher de lui à leur rang, ne considérant en eux-mêmes d'autres titres que celui de pécheurs, et ne voulant d'autre privilège que[94] de pouvoir partager les précieux moments d'un prêtre que son goût et son attrait eût fait préférer les pauvres si son zèle et sa charité ne l'eûssent fait tout à tous.
 
C'était là qu'il reconnaissait plus sensiblement les effets de ses instructions publiques. Des pécheurs à qui le plus long[95] éloignement de la confession semblait devoir faire oublier une grande partie[96] de leurs fautes S'en accusaient avec toute l'exactitude /111/ et toute la délicatesse de conscience des âmes les plus timorées. Leurs soupirs et leurs sanglots[97] en interrompaient le récit, et le papier qu'ils tenaient pour aider leur mémoire était souvent tout mouillé de leurs larmes. Une pénitence si vive[98] et si sensible ne manquait presque jamais d'être persévérante. Les sages avis du saint directeur et les pieuses pratiques qu'il prescrivait, surtout la récitation du saint rosaire, étaient de puissants secours contre les rechutes. La seule odeur de sainteté qu'il laissait dans les paroisses[99] où il avait travaillé semblait y reproduire continuellement les fruits salutaires qu'il y avait fait naitre, et l'on peut dire de même que la réputation qu'il s'y était acquise le précédait[100] et prenait le devant pour préparer la voie aux nouvelles conquêtes[101] qu'il allait faire à la grâce dans les autres missions pour lesquelles il était appelé.
 
118 ‑ La mission d'Esnandes
 
La première où nous allons le suivre fut celle d'Esnandes, qu'il commença aux approches de l'hiver. Cette paroisse est située sur le bord de la mer, à deux lieues de La Rochelle. Une grande partie des habitants s'occupent[102] à la pêche, dont ils font un assez gros commerce à La Rochelle et dans les villes voisines.
 
Ce bourg était très florissant et la plupart des familles y vivaient à leur aise. Une de celles-ci y trouva, par une juste punition de Dieu, la fin de sa prospérité, heureuse si elle sut profiter du châtiment pour satisfaire à la justice divine et pour assurer son salut. Sa décadence au moins devint un exemple frappant de la sévérité avec laquelle Dieu punit les impies, surtout lorsque l'impiété se trouve jointe à l'abus d'une grâce aussi spéciale que l'est celle d'une mission. Voici le fait aussi glorieux à la mémoire de M. de Montfort que déshonorant pour celle du malheureux qui ne voulut pas profiter de ses touchantes remontrances.
 
Le saint, missionnaire avait indiqué le plantement de la croix pour la veille de Noël, vigile consacrée[103] au jeûne et à la pénitence. Cette cérémonie attira beaucoup de monde à Esnandes. Quelques marins des bourgs du voisinage, comme de Charon et de Saint-Michel-en-Lerme, s'y rendirent en chaloupe. Il parut d'abord /112/ qu'ils n'étaient pas venus pour s'édifier, encore moins pour édifier les autres, et la première visite que firent[104] les nouveaux débarqués fut dans la plus forte auberge du lieu. Elle était située vis-à-vis le port où se devait planter la croix. On eût dit qu'ils n'avaient eu d'autres desseins en s'y logeant que de troubler la cérémonie. Ils se livraient tumultueusement au vin et à la débauche, au son des violons et d'autres instruments, comme si c'eût été un jour de carnaval. Ils poussèrent l'irréligion jusqu'à transgresser le précepte de l'abstinence et à faire mettre la broche au feu. M. de Montfort, informé du scandale, alla[105] pour en arrêter le cours, s'il était possible ; mais ses exhortations ne servirent qu'à irriter[106] les prévaricateurs, qui le chargèrent d'injures et lui firent[107] les affronts les plus atroces. Voyant qu'il ne pouvait rien gagner sur eux, il s'adressa à l'hôte et lui remontra le tort qu'il avait de prêter sa maison pour de si scandaleux excès. Il n'en fut pas plus écouté ni mieux reçu que des premiers. Il[108] ne répondait à ses charitables avis que par des jurements. Alors le saint homme pénétré de douleur ne pensa plus qu'à s'adresser à Dieu, et dit à tous ceux qui étaient présents : «Mes frères, mettons-nous à genoux, afin de demander pardon pour ce malheureux.»
Il fit en effet sa prière ; mais bien loin d'obtenir grâce pour le coupable, il connut par une lumière intérieure que Dieu voulait appesantir sa main sur lui et sur toute sa race, et qu'il le chargeait de lui en prononcer la sentence. Il se releva donc et lui dit d'un ton menaçant : «Va, malheureux, tu périras et toute ta famille.» L'oracle ne put sortir de sa bouche sans qu'il en coûtât bien à son cœur.
 
Il ne cessa pendant le reste de la mission de demander à Dieu[109] de révoquer J'arrêt qu'il venait de Porter contre ce pécheur endurci, et dont lui-même avait été l'organe, et fit faire pour lui des prières ; mais tout fut inutile. Au lieu de rentrer à lui-même et de profiter de la grâce qui lui était offerte, et qui voulait le ramener par l'impression de la crainte, il méprisa /113/ les menaces du serviteur de Dieu et mérita, par ce mépris, d'en éprouver les terribles effets.
 
Peu de jours après la clôture de la mission, il tomba perclus et tremblant de tous ses membres. Ce tremblement lui resta toute sa vie, sans que les médecins, qui épuisèrent sur lui toute leur science, pussent lui procurer aucun adoucissement, et comme si le peuple eût voulu ajouter à sa juste punition le reproche et l'opprobre, on ne le distinguait de ceux[110] de sa famille qui portaient le même nom que par le surnom de tremblant... Il ne fut pas moins puni dans ses biens que dans son corps. On le voyait sensiblement s'appauvrir d'année en année. Il avait de belles maisons, elles furent vendues. Après avoir figuré comme un bon bourgeois, il se trouva réduit à manquer du nécessaire. Enfin à mourut à Esnandes dans la plus grande pauvreté, méprisé de tout le monde et toujours tremblant jusqu'à la mort. Sa femme, qui avait eu part à son irréligion, en fut punie comme lui[111]. Elle ne lui survécut que de quelques années, d'autant plus à plaindre qu'elle prolongea plus longtemps sa honte et sa misère. Accoutumée qu'elle était dans les jours de sa prospérité à ne manger que de bons morceaux et à boire le meilleur vin, elle conserva jusque dans la mendicité ce criminel penchant pour les plaisirs de la bouche, et c'est un fait connu que, lorsqu'elle se présentait aux portes des habitants du bourg couverte de haillons, les enfants couraient dérober[112] du vin dans la maison pour le lui donner et se procurer[113] l'amusement de la voir ivre. Elle mourut dans une chaumière sur une poignée de paille. La postérité[114] de ces deux coupables époux avait été comprise dans la malédiction que Dieu avait fait prononcer contre eux ; elle l'a éprouvée et elle subsiste encore. De leurs enfants, les uns ont péri sur mer, les autres ont vécu très peu. Il n'en est demeuré qu'une fille[115], mais qui est tombée dans un état d'imbécillité au point d'avoir besoin d'être retirée par charité chez une de ses parentes. Telle a été la destinée de cette famille, que nous n'avons pas voulu[116] nommer par ménagement pour les personnes qui peuvent lui appartenir, quoique tout ce que nous venons de rapporter soit de notoriété publique dans le canton. /114/ Heureuses encore ces déplorables victimes[117] des vengeances du Ciel, si elles ont su en profiter, et si elles ont fait servir à leur propre sanctification ce qui doit être pour tant d'autres une leçon bien salutaire.
 
Après cette mission M. de Montfort se retira à son ermitage de St Eloi pour y vaquer plus à loisir aux, exercices de la vie intérieure[118] ou plutôt pour se livrer sans réserve[119] aux douceurs de la contemplation à laquelle il employait presque toutes les heures du jour et de la nuit. Mais enfin il fallut laisser un repos[120] si saint et si tranquille[121] et sacrifier les charmes de la solitude aux fonctions de l'apostolat.
 
119 ‑ Mission dans une paroisse qui n'est pas nommée
 
Il sortit de sa retraite pour aller dans une paroisse qui avait un extrême besoin de tout son zèle. Le démon de la discorde y régnait avec un plein empire. Non seulement les paroissiens étaient animés les uns contre les autres, le pasteur lui-même entrant dans cette scandaleuse division se trouvait chargé de la haine de presque tout le troupeau et[122] traitait réciproquement /115/ comme ennemis ceux dont il devait être le père. Ce n'était de part et d'autre que médisances, calomnies, injures, imprécations. Le mal était à un point que le saint missionnaire a avoué n'avoir jamais rien vu de semblable. L'esprit du curé surtout était tellement ulcéré qu'il[123] faisait éclater son ressentiment en toute rencontre et ne cessait de maudire le jour où il avait mis le pied dans la paroisse. M. de Montfort ne s'apercevant pas que ses premiers discours fissent sur lui[124] et sur le reste de ses auditeurs aucune impression, eut recours à ses armes ordinaires : la prière, les jeûnes, les macérations, les sanglantes disciplines. Cependant il annonça un sermon sur une matière de grande importance, et exhorta tout le monde à s'y trouver autant qu'il serait possible. On comprend bien que c'était sur le pardon des injures et la nécessité de la réconciliation qu'il devait prêcher. Il le fit à son ordinaire, c'est-à-dire avec cette force et cette onction à quoi il est difficile (de) résister[125]. Il n'était pas rendu à la fin que M. le curé l'interrompit, et après avoir parlé quelques moments demanda tout haut pardon à son peuple du mauvais exemple qu'il lui avait donné par sa conduite si opposée[126] à la douceur, à la patience, à la charité. La réparation était trop édifiante et la circonstance trop favorable pour que le prédicateur négligeât d'en tirer avantage. Il sut en profiter pour engager tous ses auditeurs[127] à entrer dans les mêmes sentiments et à les manifester à l'heure même d'une manière aussi éclatante et aussi exemplaire.
 
Il leur parla donc à peu près en ces termes ‑ «Eh ! quoi, mes frères, voilà votre pasteur qui, pour[128] éteindre toute inimitié entre vous et lui, vous[129] prévient,[130] vous supplie de lui pardonner, et vous, après avoir si souvent manqué à ce que vous devez à sa[131] personne et à son caractère, vous ne voudriez pas vous réconcilier avec lui ? ... Vous ne...[132]», il n'eut pas le temps d'achever. On entendit de tous les coins[133] de l'église mille voix confuses demander pardon au pasteur. Les larmes coulèrent en abondance. L'ancienne inimitié ayant fait place à des sentiments de regret, de confusion, d'attachement, d'estime, on les exprimait encore mieux par des soupirs et des gémissements qu'on ne le pouvait faire par des paroles, et ce langage si touchant était une réponse[134] bien positive à la demande de l'orateur chrétien[135]. Cependant il restait encore la moitié de l'ouvrage. /116/ Les paroissiens n'étaient pas moins divisés entre eux qu'ils étaient ennemis du pasteur. Le missionnaire pacificateur profita de l'heureuse disposition où il les voyait pour les porter également à se réconcilier ensemble. Il reprit donc son discours et finit en disant aux hommes de se donner dans le moment même le baiser de paix. Il dit ensuite aux personnes du sexe d'en faire autant, les unes avec les autres. C'est ainsi[136] qu'à la faveur de la confiance qu'on avait en lui, et par un privilège unique, il savait agir avec ses auditeurs comme un père avec ses enfants, ou plutôt c'est ainsi qu'il savait prêcher en saint et en apôtre.
 
Après cette touchante réconciliation, consacrée par la sainteté du lieu et la présence même de Jésus-Christ, il demanda qu'on voulût bien le prendre pour arbitre des différents que l'on pouvait avoir et que chacun vînt le trouver pour lui exposer les griefs et lui confier ses intérêts. On comprit qu'on ne pouvait mieux faire. Tout fut remis à sa décision, et ce qu'on ne peut assez admirer, c'est que parmi tant de personnes entre lesquelles il fallut prononcer[137], il ne se trouva pas un seul réfractaire.
 
L'ange de la paix avait parlé. Plus de murmure, plus de plaintes. La sentence ne fut-elle pas favorable, était réputée une grâce. Un sage accommodement avait su partager le droit douteux, un jugement décisif[138] avait confirmé le droit certain. La charité avait fait sacrifier de légitimes prétentions. On se retirait du tribunal comme d'un exercice de religion où le ministre du Seigneur avait présidé, et il eut la consolation[139] de voir, avant la fin de la mission, l'union et la tranquillité rétablies dans une paroisse où il n'avait trouvé en arrivant que l'image trop ressemblante d'une guerre civile. Le curé[140] lui-même aussi docile à ses conseils que le dernier des paroissiens, soutint avec édification la première démarche qu'il avait faite pour leur donner l'exemple, s'attira leur confiance, et ne cessa le reste de sa vie de les édifier par sa douceur, sa modération, sa piété, son zèle, sa vigilance.
 
Cette mission[141] fut suivie de celle de Courson. On ne peut mieux juger des fruits qu'elle produisit que par les sentiments d'attachement et de vénération que conserva toujours pour M. de Montfort celui qui l'avait appelé pour le salut de son troupeau et pour sa /117/ propre sanctification. Il lui donna sa confiance et profita si bien de la direction de ce grand maitre qu'il ne s'écarta jamais de la route qu'il lui avait tracée[142]. Il parlait souvent de lui[143], et n'en parlait qu'avec effusion de cœur et une joie qui paraissait sur son visage. Il ne pouvait se lasser de dire qu'il avait des grâces infinies à rendre à Dieu de l'avoir connu, d'avoir eu l'avantage de le posséder chez lui et de pouvoir étudier de près un si parfait modèle.
 
120 ‑ La Règle de la Compagnie de Marie
 
Ces deux missions finies, M. de Montfort se retira dans son hospice de Saint-Eloi, car il avait toujours un ardent désir de rentrer dans cette chère solitude, quand il était à portée de le faire par la proximité de ses missions. Ce[144] fut, selon toutes les apparences, pendant les petites retraites intermédiaires[145] qu'il traça le plan de sa nouvelle Congrégation de missionnaires. Ce qu’il y a de bien certain, c'est qu'il était tout dressé lorsqu’à la fin du mois de juin 1713 il partit pour Paris, comme nous le dirons dans la suite[146].
 
Les dispositions de ce projet nous ont paru si sages et si parfaites[147], que nous avons pensé que le lecteur nous saurait bon gré[148] d'en donner ici le détail.
 
L'ouvrage[149] porte en titre :
Règle des Prêtres Missionnaires de la Compagnie de Marie
 
«Il faut, dit le pieux[150] instituteur, que les prêtres qui entrent dans la Compagnie soient appelés de Dieu à faire des missions sur les traces des apôtres et non à vicarier, régir des cures, enseigner la jeunesse ou former des prêtres dans les séminaires, comme font tant de bons ecclésiastiques qui sont appelés de Dieu dans ces saints emplois. Ils évitent par conséquent ces emplois comme contraires à leur vocation apostolique afin de pouvoir dire avec Jésus-Christ : Evangelizare pauperibus misit me (Luc IV, 18) ou bien avec l'apôtre : Non enim misit me Christus baptizare, sed evangelizare. (l ad Cor. 1, 17).
 
Ils font toutes leurs missions à l'abandon de la Providence, ne /118/ prenant aucune fondation pour aucune mission à l'avenir. Ils n'ont d'autre ressource que la divine Providence, qui les entretient pendant leurs missions par qui et de la manière qu'il lui plait, et cela pour quatre raisons principales :
 
1 ‑ Parce que c'est l'exemple que Jésus-Christ, les apôtres et les hommes apostoliques nous ont donné.
 
2 ‑ Parce que Dieu rend au centuple dès ce monde, et donne souvent, comme l'expérience le fait connaître, la grâce de la conversion à ceux et celles qui contribuent aux frais de la mission pour les récompenser de leur charité : Date, et dabitur vobis. (Luc VI, 38).
 
3 ‑ Parce qu'il se fait par cette mutuelle charité un gain et une union admirable des cœurs des auditeurs avec celui des prédicateurs et des missionnaires. La charité engendre la charité.
 
4 ‑ Parce que la grâce d'une mission faite à la Providence, dans une si grande dépendance du public, (ce que la nature orgueilleuse ressent infiniment) est sans comparaison beaucoup plus abondante et plus puissante pour convertir les âmes que celle des missions fondées, où les missionnaires sont dans une espèce d'élévation et d'indépendance qui flatte l'orgueil, qui, en leur procurant de l'honneur, ne leur en procure pas plus d'amour du prochain et de grâces de Dieu. Il faut avoir expérimenté[151] ces deux manières de faire les missions pour le connaître.
 
Il leur est absolument défendu, soit pendant la mission soit après la mission, de demander à personne, directement ou indirectement, aucun argent. Il ne leur est pas cependant[152] défendu de dire en public, ou en particulier, leur état de Providence et leur règle sur ce sujet.
 
Ils vont dans leurs missions autant qu’ils peuvent à pied, à l'exemple de Jésus-Christ et des hommes apostoliques ; mais dans leurs infirmités ou les grandes difficultés, il leur est permis de prendre les aides que la divine Providence leur fournit soit pour se /119/ transporter d'une mission à une autre, soit pour le port et le rapport de leur bagage.
 
Il faut qu'ils soient sans bénéfices, même simples. Si quelqu'un en possédait, il s'en démettra, selon l'avis d'un homme sage, avant que d’être admis membre de la Compagnie[153].
 
Ainsi détachés de tout emploi et soins, sans embarras capables de les arrêter et fixer, ils sont légers pour courir avec les saint Paul, les saint Vincent Ferrier, les saints François-Xavier et les autres apôtres, partout où Dieu les appellera, soit dans les villes, soit dans les campagnes, soit dans un bourg, soit dans une petite bourgade, soit dans un évêché, soit dans un autre, soit auprès, soit au loin, toujours prêts à dire à l'appel de l'obéissance : Paratum cor meum, Deus... ecce adsum, ecce venio[154]. Quoiqu'ils ne limitent pas la grâce de Dieu ni leur zèle dans les seules campagnes, ils participent cependant aux plus tendres inclinations de Jésus-Christ, leur modèle, qui a dit qu'il était envoyé pour évangéliser les pauvres ; c'est ce qui les fait[155] ordinairement préférer la campagne à la ville, les pauvres aux riches.
 
La Compagnie a une maison où 'Les missionnaires se retirent pendant le repos qu'ils prennent par intervalles, suivant ce que Jésus-Christ, la Sagesse incarnée, disait à ses Apôtres : Venite seorsum... et requiescite pusillum (Marc VI, 31). Pendant ce temps ils s'appliquent à l'étude et à la prière pour se perfectionner de plus en plus dans la science de la chaire et du confessionnal, et attirer les bénédictions du ciel sur leurs personnes et leur ministère. Et si quelqu'un d'eux devient, par l'âge ou la maladie, hors d'état d'aider aux missions, il y finit ses jours dans la retraite et la solitude. Ils n'ont ni argent ni meubles en propre, la maison leur fournissant ce qui est nécessaire pour le vêtement et la nourriture.
 
On ne reçoit point dans la Compagnie de prêtres malsains ou infirmes /120/ étant pour lors hors d'état de remplir l'essentiel de l'Institut, qui est de travailler aux missions.
 
Jamais ils ne se chargent d'écoliers, de pensionnaires ecclésiastiques ou la
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ques, quand ils voudraient donner tout leur bien. On y reçoit pourtant des frères la
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ques, pour avoir soin du temporel ; mais il faut qu'ils soient détachés, vigoureux, obéissants, prêts à faire tout ce qu'on leur ordonnera.
 
Le Supérieur est toujours pris dans la Compagnie, et tous lui obéissent, soit pour l'application aux emplois, soit pour le bon ordre de la Compagnie.
 
Si la charité en est la supérieure et la reine qui doit gouverner avec la baguette d'or, l'obéissance en est le fondement, et le soutien inébranlable de toute sa sainteté, et de tous les fruits que Dieu fait par son ministère ; et les missionnaires sont si pénétrés d'estime et d'amour pour cette vertu qu'ils regardent la désobéissance formelle et obstinée au supérieur, même en chose légère, comme un crime qui emporte exclusion.
 
Ils obéissent à l'évêque dans le diocèse duquel ils travaillent, et agissent de concert avec le curé de la paroisse où ils font la mission, dans les choses qui regardent le lieu, le temps et les autres circonstances qui sont indifférentes en elles-mêmes et qui deviennent salutaires et très importantes quand elles sont réglées par l'obéissance.
 
Le but de leurs missions étant de renouveler l'esprit du christianisme dans les chrétiens, ils en font renouveler les promesses de la manière la plus solennelle qu'il est possible, comme ils en ont reçu l'ordre de notre Saint-­Père le Pape Clément XI. Il faut avoir expérimenté le fruit de cette pratique pour en connaitre le prix.
 
Tout dévoués à la sainte Vierge, et appuyés de la protection de cette reine des anges, ils attirent autant qu'il est en eux, tout le monde à son service, en établissant de toute l'étendue de leur zèle[156] dans le cours de leurs missions la grande dévotion de son saint Rosaire. Ils en expliquent tous les mystères, les vertus et l'esprit propre de chaque mystère, les offrandes dont il est /121/ composé, dans leurs conférences, prédications et autres instructions ; et surtout ils en insinuent et en apprennent la pratique aux fidèles par leur exemple en récitant, tous les jours, le rosaire en entier à trois différents temps de la journée, un chapelet en français à chaque exercice. Voilà un des plus grands secrets venu du ciel pour arroser les cœurs de la rosée céleste, et leur faire porter les fruits de la parole de Dieu.»
 
Tel est le plan de l'Institut de M. de Montfort, ou de la société de missionnaires qu'il appela d'abord la Compagnie de Marie.
 
Cependant[157] il ne suffisait pas qu'il eût tracé sur le papier un plan si ‑beau et si conforme à l'esprit apostolique. L’essentiel était de l'exécuter. Dieu qui le lui avait inspiré[158] l'éclaira aussi sur les moyens propres à le remplir. Le premier qu'il employa fut d'en aller conférer avec ses anciens amis, messieurs les directeurs du séminaire du St Esprit à Paris, avec lesquels il avait toujours entretenu l'étroite liaison[159] qu'il avait eue avec M. Desplaces[160].
 
121 ‑ Mission à la Séguinière
 
Il s'était déterminé pour son voyage, mais avant de l'entreprendre il ne put se refuser aux instances de M. Kentin curé de la Séguinière qui, depuis quelque temps, le pressait de venir à son secours dans une paroisse où malgré son zèle et sa vigilance, il restait encore beaucoup de bien à faire et beaucoup de mal à détruire. Ce digne pasteur était persuadé d'ailleurs que malgré le travail assidu d'un curé et d'un vicaire dans une paroisse considérable, une mission y est toujours utile et souvent nécessaire. La parole de Dieu toujours annoncée par le même ministre n'a plus le même attrait pour[161] le peuple, et l'assiduité avec laquelle on la lui annonce n'est pas ce qui contribue le plus à la lui faire écouter avec empressement. Un prêtre attirera d'abord la foule par son onction et ses talents. Il aura beau ensuite à se surpasser lui-même à varier ses discours, il ne fera pas revivre le charme de la nouveauté. C'est toujours le même homme qui parle. Il ne fait plus que de faibles impressions. Pour peu que sa morale soit sévère, /122/ on se persuade qu'elle lui est propre. La régularité même de sa vie autorise cette prévention ; on souhaiterait entendre un autre prophète ; mais ailleurs ils sont rares, et le devoir oblige de s'attacher à celui-ci. Le sien est de condescendre au désir de son peuple, de lui procurer quelqu'envoyé de Dieu, qui, prêchant le même évangile, confirme ce qu'il a prêché lui-même, et l'insinue plus profondément par une nouvelle manière[162] d'exhorter et d'instruire. L'exercice de son ministère au tribunal de la pénitence lui fait mieux sentir encore le besoin d'un secours étranger. Il craint que la véhémence avec laquelle il a parlé contre les vices n'ait inspiré trop de timidité[163] et gêné la liberté de les lui découvrir. Il sait qu'obligé de vivre familièrement avec ses paroissiens et de les connaître tous, des raisons de prudence et quelquefois une véritable nécessité peut les mettre[164] dans le cas de chercher un inconnu, et qu'enfin il est certains péchés énormes que l'on dit avec bien plus de confiance à un prêtre que l'on[165] n'a jamais vu et que, peut-être, on ne verra jamais.
 
Le sage pasteur, touché de tous ces motifs, désirait autant une mission[166] que d'autres évitent de s'en procurer par des raisons toutes contraires, et surtout parce qu’ils voient bien que la réforme générale qui est ordinairement la suite de cette œuvre sainte devrait commencer par eux-mêmes, ne pouvant d'ailleurs soutenir de voir leurs brebis avoir[167] pour un autre une docilité
 
8eme Cayer
 
et une confiance dont jamais ils ne se sont rendus dignes.
 
Le bruit qui se répandit dans tout le canton que la mission allait se donner à la Séguinière fit qu'il se trouva à l'ouverture un concours extraordinaire de peuple de tous les cantons voisins. La suite répondit aux commencements. Jamais mission ne fut plus fréquentée[168] et plus édifiante. Il s'y fit un nombre prodigieux de conversions. Plusieurs furent éclatantes, ou plutôt c'était pour tous la même chose d'être pénitents et de le paraître. Enfin ce fut[169] un renouvellement universel dans toute la paroisse, et le pasteur eut la consolation d'y voir[170] dans le /123/ court intervalle de quelques semaines, la ferveur succéder au relâchement, le bon exemple aux scandales et une piété éclairée à la superstition.
 
Mais ce qui mit le comble à sa joie, et ce qui fait en même temps son éloge, ce fut la longue persévérance des fruits de la mission. Il les cultiva avec le même zèle qu'il l'avait procurée, et il le fit avec tant de succès que[171] huit à neuf ans après, se trouvant à Angers avec M. Gran­det qui travaillait alors à la vie de M. de Montfort, il lui assura que sa paroisse avait conservé toute la ferveur dans laquelle[172] M. de Montfort l'avait laissée ; que le chapelet se disait tous les jours dans son église avec une grande affluence de monde, et trois fois les dimanches et fêtes, un à la fin de la première messe, un autre après midi et le troisième après les vêpres. Il ajouta qu'il ne croyait[173] pas qu'il y eût une seule maison dans sa paroisse où chacun ne le récitât[174] en particulier, ou en commun. Nous avons souvent remarqué que M. de Montfort n'avait point trouvé de moyen plus sûr pour affermir le peuple dans les sentiments de piété qu'une mission leur avait inspirée, que de les[175] engager à réciter tous les jours cette prière[176] si sainte, si autorisée, si salutaire. Il n'est guère possible en effet qu'une personne qui sera fidèle à rendre journellement à Jésus-­Christ et à sa divine Mère ce tribut de louanges, n'ait toujours présents à l'esprit les motifs qui l'ont portée à en former la résolution, et qu'elle ne se rappelle en même temps les grandes vérités qui firent alors tant d'impression sur son esprit. C'est donc tout à la fois[177], et une espèce de méditation continuée depuis celles qu'elle avait entendues, et une source toujours ouverte où elle puise les grâces les plus spéciales pour ne pas s'écarter de la bonne voie où elle a eu le bonheur de rentrer. Lorsque messieurs les curés, qui nous font l'honneur de nous appeler dans leurs paroisses, se donnent le soin[178] de soutenir ce pieux usage, il leur reste bien peu à faire pour recueillir longtemps les fruits de leur zèle et de notre travail.[179] /124/
 
Celui que M. de Montfort avait eu à soutenir pendant la mission de la Séguinière le réduisit à une si grande faiblesse qu'il craignit de ne pouvoir remplir la dernière semaine. Cependant Dieu le soutint et il n'interrompit aucun des exercices. Il ne voulut pas même, la mission finie[180], se rendre aux invitations[181] de M. le curé qui le pressait de rester chez lui pour prendre quelque repos, ni accepter J'offre que lui firent mesdemoiselles de Beau­veau, sœurs de M. l'évêque de Nantes, de venir se délasser au château de la Treille. Il était trop occupé de son voyage de Paris et du sujet qui le lui faisait entreprendre. Le courage lui donna de la force.
 
122 ‑ Voyage à Paris
 
Il se mit en chemin à pied, car il n'allait jamais autrement, même dans les plus longs et dans les plus pénibles voyages. Il passa par Angers et se rendit en assez bonne santé à Paris. Une de ses premières visites fut à la Communauté du Saint-Esprit. Elle était déjà nombreuse et réunissait[182] d'excellents sujets de différents pays, qui s'y distinguaient par leur piété et leur science. Il[183] trouva ces messieurs assemblés en récréation. Après qu'il les eut tous salués en général, on fut assez surpris de le voir aller discerner et embrasser un jeune séminariste qui ne s'attendait nullement à cette distinction, et qui sans savoir à quoi l'attribuer n'y fut pas insensible ; mais tandis qu'il s'en applaudissait intérieurement, le saint prêtre déclara tout haut : «Qu'il avait cru devoir cette marque d'amitié particulière à ce jeune homme parce qu'il était le plus pauvrement vêtu de toute la compagnie, et que les livrées de la pauvreté méritaient partout où elles se trouvaient des égards particuliers.» Tout le monde fut extrêmement édifié de cette pieuse saillie, et une déclaration si ingénue à laquelle le jeune homme ne s'attendait pas, servit de remède à la petite[184] enflure de cœur qu'il avait ressentie d'abord, et devint une leçon très utile, tant pour lui, qui l'a racontée lui-même, que pour toute la compagnie.
 
Ce n'était cependant pas là une de ces humiliations dont M. de Montfort / 125/ aurait fait ses délices et qu'il eût regardée comme la plus heureuse rencontre. Il lui en fallait de bien plus marquées et de toute une autre nature. Il les[185] trouva à Paris comme ailleurs, ou plutôt il trouva à Paris plus qu'ailleurs de quoi satisfaire son attrait pour les opprobres et les croix. Tout ce qu'on avait dit contre lui dans les provinces avait été répété et exagéré dans la capitale. Mille faits supposés ou déguisés, mille fables[186] ridicules mises sur son compte y trouvèrent créance. On l'y avait même peint sous les traits les plus noirs. Les pieuses inventions de son zèle étaient racontées comme des farces extravagantes. On avait travesti ses actions les plus innocentes jusqu'à les faire passer pour des excès scandaleux, et les calomniateurs assuraient les choses avec tant de fermeté que les moins crédules étaient disposés à les croire. Il vit même les préjugés entraîner jusqu'à ses amis, et il ne lui en reste guère que parmi les amis de la Croix. Aussi était-ce auprès d'eux qu'il allait non point décharger son cœur, mais faire éclater sa joie[187] lorsqu'il lui arrivait quelqu'une de ces croix plus accablantes pour la nature et qu'il appelait des croix de poids. Il les invitait à s'en réjouir avec lui, à rendre gloire à Dieu et à joindre leurs actions de grâces à celles qu'il ne cessait de lui offrir. C'était la matière ordinaire de ses entretiens avec quelques saintes personnes[188] qu'il savait être conduites par les mêmes voies que lui, et dont il chercha à se procurer la connaissance.
 
Une de celles avec qui il eut une liaison plus étroite de confiance et de piété fut mademoiselle de la Vieuville. Cette sainte fille, qui semble n'avoir vécu quatre-vingt-six ans que pour être plus longtemps la bonne odeur de Jésus-­Christ dans le monastère de l'Adoration Perpétuelle, était l'élève comme[189] la nièce de madame de Bar, surnommée sœur Mectilde du Saint-Sacrement, fondatrice de ce religieux institut. Formée à une si bonne école, elle avait fait de grands progrès dans les voies de la perfection et surtout dans l'amour de Jésus-Christ et de sa Croix. Elle avait un talent particulier pour engager et pour soutenir une conversation spirituelle et parlait de Dieu comme /126/ un ange. Dès qu'elle eut connu M. de Montfort, elle aperçut un si grand rapport entre les sentiments de l'homme de Dieu et les siens au sujet des croix qu'elle ne pouvait lui parler d'autre chose. C'était à qui en relèverait avec plus d'effusion de cœur, le bonheur et les avantages. Le saint prêtre surtout en parlait avec de si violents désirs d'en avoir[190], il était, au témoignage de mademoiselle de la Vieuville elle-même, si éperdument amoureux des croix et des humiliations qu'il l'a obligée bien des fois de demander pour lui et avec lui d'en être gratifié. C'eût été un[191] spectacle bien édifiant pour une tierce personne, s'il s'en fut trouvé à la grille, de les, voir à genoux chacun de leur côté faire à Dieu une prière si différente de celles qu'on se demande communément en signe d'amitié. La pieuse demoiselle[192], si docile à entrer dans les vues de M. de Montfort, eut tout lieu de penser qu'elle avait été exaucée dans les prières qu'elle avait faites pour lui. Il[193] continua à être humilié, persécuté. Les croix semblaient naître sous ses pas et l'attendre dans tous les endroits[194] où il allait. Voici comment il s'en explique[195] lui-même dans une lettre qu'il écrivit à sa sœur religieuse à Rambervilliers du 15 août 1713.
 
«Vive Jésus, vive sa Croix.
 
Si vous saviez mes croix et mes humiliations par le menu, je doute si vous désireriez si ardemment de me voir, car je ne suis jamais dans aucun pays que je ne donne un lambeau de ma croix à mes meilleurs amis, souvent malgré moi, et malgré eux. Aucun ne me peut soutenir et n'ose se déclarer pour moi, qu'il n'en souffre et quelquefois qu'il ne tombe sous les pieds de l'enfer que je combats, du monde que je contredis, de la chair que je persécute. Une fourmilière de pécheurs et de pécheresses, que j'attaque, ne me laisse[196], ni à aucun des miens, aucun repos. Toujours sur le qui-vive, toujours sur les épines, sur les cailloux piquants, je suis comme une balle dans un jeu de paume. On ne l'a pas plutôt poussée[197] d'un côté qu'on la repousse de l'autre, en la frappant rudement.
 
Cependant, ma chère sœur, bénissez-en Dieu pour moi, car je suis content et joyeux au milieu /127/ de toutes ces souffrances, et je ne crois pas qu'il y ait au monde rien de plus doux pour moi que la croix la plus amère, quand elle est trempée dans le sang de Jésus-Christ[198] et dans le lait de sa divine Mère... »
 
Il paraît par cette lettre que tous les amis du serviteur de Dieu ne l'avaient pas abandonné. Messieurs les directeurs du séminaire du Saint-Esprit furent du nombre de ceux qui lui demeurèrent constamment attachés. Redevables de leur établissement à[199] feu M. Desplaces, son ami, ils eurent toujours pour lui l'estime et l'amitié que cet illustre défunt lui avait témoignées jusqu'à la fin. Ces sentiments leur étaient devenus comme héréditaires ; ils ne les cachaient pas, et, quoi qu'ils ne pussent approuver, comme bien d'autres personnes fort vertueuses, certaines actions extraordinaires du vénérable et digne[200] prêtre, ils avaient du moins la sagesse et la discrétion de ne les pas blâmer, et, remontant à la source d'où[201] elles partaient, ils y reconnaissaient une intention pure, un zèle ardent, une simplicité évangélique, un mépris souverain du monde, un affranchissement entier de tout respect humain. Ce n'était point au reste dans la crainte de s'écarter des règles de la charité qu'ils le supposaient animé de l'esprit de Dieu, les preuves en étaient trop sensibles. L'obéissance et l'humilité sont[202] la marque à laquelle on peut distinguer sûrement les œuvres[203] vraiment saintes[204] de celles qui n'en ont que l'apparence. Ces deux vertus paraissaient d'une manière bien sensible dans toutes les actions[205] de M. de Montfort. Elles en étaient comme l'âme et le mobile. On le voyait toujours aveuglément soumis aux ordres les plus rigoureux et les moins attendus, et peut-être ne se les fût-il jamais attirés si le désir d'être humilié, méprisé, ne l'eût rendu trop peu attentif à certaines considérations, qui ne sont point opposées au zèle et à la liberté évangélique. Enfin, les vertueux amis, que les préjugés ne purent entraîner, ne voyaient en lui que ce qu'on avait admiré dans les grands[206] hommes dont la mémoire était toute récente, et qu'il[207] s'était proposé pour modèles, /128/ un Père Eudes, un Père Honoré, un M. Bourdoise, un M. le Nobletz, M. Desplaces lui-même, leur instituteur et leur père. Ce fut donc à la faveur de ce commerce mutuel d'amitié, de confiance, d'estime réciproque[208], qu'il s'ouvrit à eux sur le dessein qu'il avait de former une Compagnie de missionnaires, uniquement occupés à en faire les fonctions et dégagés de tous autres soins que d'acquérir les connaissances et de vaquer aux exercices de piété propres de leur état. Il leur communiqua son plan[209] et leur donna lecture du règlement qu'il avait fait pour ceux de leurs élèves et autres qui voudraient se joindre à lui pour entrer dans la même carrière[210]. Tous applaudirent à son projet, et messieurs les directeurs lui promirent d'y concourir efficacement en lui formant des sujets capables de soutenir[211] et de perpétuer cette bonne œuvre. En conséquence de cette déclaration, qu'on regarda de part et d'autre comme une espèce de traité, il écrivit aussitôt à la tête de sa Règle ces paroles qui en furent comme la formule : «Il y a à Paris un séminaire, et c'est celui du Saint-Esprit, où les jeunes ecclésiastiques qui ont vocation aux missions de la Compagnie de Marie, se disposent par la science et la vertu à y entrer. » Et pour mieux en[212] inculquer le souvenir dans l'esprit des lecteurs, il les écrivit une seconde fois dans le corps de l'ouvrage. Il ne s'en tint pas là. Il voulut éterniser[213] par un monument public et sacré cette[214] heureuse et sainte association[215]. Il fit faire une figure de bois de la sainte Vierge, ornée de peintures, de[216] la hauteur d'environ un pied et demi. Elle était revêtu d'un manteau[217], tout ouvert aux côtés en forme d'éventail, à l'ombre duquel il y avait douze petites figures de prêtres, savoir six de chaque côté, qui, les mains jointes et les yeux fixés sur leur bonne Mère, semblaient se féliciter d'être admis dans sa Compagnie. La vétusté et le dérangement qu'il a fallu faire depuis ce temps dans la maison sont cause que /129/ les douze figures ne se trouvent plus dans leur même place, mais l'image de la sainte Vierge est toujours décemment placée dans une salle de la maison, où messieurs les directeurs et leurs élèves ne manquent jamais de se mettre, tous les jours, à genoux devant elle et de la saluer en disant un Ave Maria, un Sub tuum prcesidium, etc..., soit après la prière, soit lorsqu'ils vont en ville et qu'ils en reviennent.
 
Telle est l'origine de l'union intime qui règne entre[218] messieurs de la communauté du Saint-Esprit et les missionnaires de Saint-Laurent-sur-Sèvre. C'est pour satisfaire aux engagements volontaires de cette alliance toute sainte que les disciples de M. Desplaces[219] se font un devoir d'envoyer[220] de leurs jeunes élèves à l'[221] établissement de M. de Montfort, quand ils en trouvent quelques-uns qui ont la vocation d'y entrer. Et comme cette confraternité a commencé sous les auspices de la Reine du Ciel[222], ceux qui viennent s'incorporer dans la nouvelle Compagnie[223] sont bientôt exercés aux pieuses pratiques par lesquelles elle fait gloire[224] de lui être totalement dévouée, et qui servent à nourrir le zèle dont[225] elle (est) animée pour soutenir son culte[226], pour défendre ses privilèges, surtout celui de son Immaculée Conception, pour lui gagner tous les cœurs, et attirer, s'il était en son[227] pouvoir, le monde entier à son service.
 
Une amitié si solidement établie n'a jamais reçu aucune altération. On la cultive soigneusement de part et d'autre. De part et d'autre[228], mêmes vues, mêmes sentiments, même zèle, même esprit de pauvreté et d'abandon à la divine Providence, même ardeur pour la gloire de Dieu et le salut des âmes.
Les premiers à qui les touchantes exhortations de Mr de Montfort inspirèrent le dessein de se consacrer à l'œuvre des missions[229] furent messieurs Thomas, Vatel, Hédan et Le Vallois. M. Vatel fut cependant le seul qui y travailla du vivant du serviteur de Dieu. Les trois[230] autres[231] n'eurent pas l'avantage de l'avoir pour maitre et pour guide, /130/ et ne vinrent qu'après sa mort ; mais[232] la vocation de M. Le Vallois eut quelque chose de si marqué[233] que nous croyons devoir faire ici une mention spéciale de ce digne missionnaire[234].
 
123 ‑ La vocation de M. Le Vallois
 
M. Jacques Le Vallois naquit à La Haye‑Belfond, dio­cèse de Coutances, le 6 octobre 1690. Dès qu'il fut en état d'apprendre les premiers principes de la langue latine, on l'envoya au collège, où son application à ses devoirs répondit toujours à l'innocence de ses mœurs. Ses humanités finies, M. Vatel son ami et son voisin, qui était déjà au séminaire du Saint-Esprit, l'y attira. La ferveur régnait, comme elle a toujours régné, dans cette maison. M. Le Vallois y trouva de grands exemples et y devint bientôt lui-même un excellent modèle. Il paraissait en lui je ne sais quoi d'animé et de fervent, qui le distinguait des autres, lors même qu'il semblait[235] ne rien faire de plus qu'eux. Il fut fait réglementaire, quoi qu'il n'y eût pas encore un an qu'il fut dans la communauté. Son humilité en fut alarmée. Il obéit cependant, et sa bonne conduite dans cet emploi aussi étendu que difficile, justifia le choix que le supérieur avait fait de lui. L'abstinence la plus rigoureuse et les pénitences en tout genre, qu'il portait à un pieux excès, eussent bientôt altéré sa santé et son tempérament si l'on n'y eût mis des bornes. On lui en accorda pourtant assez pour faire le supplice de la nature, pendant huit ans qu'il demeura au séminaire. Les supérieurs le laissèrent toujours réglementaire de la maison, ce qui fait mieux son éloge que tout ce qu'on pourrait dire. Il y avait à peine deux ans qu'il était à Paris lorsque M. de Montfort y parut en 1713. Ce fut dans les entretiens qu'il[236] avait avec la communauté qu'ils commencèrent à se connaître. Comme sa conversation, /131/ aussi gaie qu'édifiante, attirait toujours autour de lui la plus grande partie du séminaire pendant les récréations, le jeune Le Vallois était toujours celui qui cherchait à s'en approcher de plus près. Il écoutait attentivement toutes les paroles qui sortaient de sa bouche, et dès lors il le regardait comme un saint. Il disait en lui-même : «Voilà un saint, voilà un homme dont on écrira la vie, comme celle de M. Le Nobletz que nous lisons à présent au réfectoire.» Ce sont ses propres termes. Un jour, l'homme de Dieu, qui pensait[237] à rassembler des prosélytes[238], se voyant entouré de cette pieuse jeunesse leur dit à tous ‑. «Sur lequel d'entre vous vais-je jeter mon sort ? » Puis, se tournant lentement au milieu d'eux et les fixant[239] tous les uns après les autres, comme s'il eût voulu lire dans leurs yeux et dans leurs cœurs, il ôte le chapeau du réglementaire, met son grand chapeau plat en sa place et dit : «C'est sur celu-ci, il est bon, il m'appartient, et je l'aurai.» M. Le Vallois crut qu'il ne parlait que de son chapeau, qui était neuf. Il ne fut pas longtemps à être détrompé et à comprendre qu'il était question de sa personne. En effet, un instant après il sentit un violent désir de se joindre à lui. Il en conçut[240] le dessein sans pourtant le manifester, parce qu'il voulait, disait-il en lui-même, finir ses études. Il demeura donc encore près de sept ans au séminaire, pour se former de plus en plus au ministère évangélique[241]. Nous verrons dans la suite comment il répondit à sa vocation.
 
124 ‑ M. Caris et les missions
 
Quoique messieurs les directeurs de la communauté du Saint-Esprit ne fûssent alors qu'un nombre suffisant de prêtres pour remplir les emplois et conduire la maison, le désir qu'ils avaient d'obliger M. de Montfort, en secondant son zèle, les porta à faire[242] pour lui quelque sacrifice, et il fut arrêté d'en détacher un d'entre eux pour l'accompagner dans ses courses apostoliques, en attendant qu'on lui eût formé[243] des sujets. M. Caris fut celui de tous qui marqua plus d'empressement /132/[244] pour suivre le saint homme. Non content de former des missionnaires, il voulut devenir missionnaire lui-même, et il prit si bien ses mesures qu'il fit tomber le sort sur lui. Depuis ce moment, qui lui paraissait le plus heureux de sa vie, il ne songea plus qu'à se préparer aux missions. Le jour du départ fut fixé ; déjà le bâton blanc à la main et le bréviaire sous le bras, il allait faire ses adieux, lorsque M. le supérieur, qui n'avait pu dormir toute la nuit le prévint et lui dit : «Qu'à la vérité il ne doutait nullement qu'il ne fît beaucoup de bien dans les missions, mais qu'il était persuadé qu'il en ferait encore plus à la communauté, et qu'il ne pouvait le laisser partir ; qu'en un mot, il retirait le consentement qu'il lui avait donné.» Un changement si soudain, et auquel on ne s'attendait pas,[245] fut pour lui un coup de foudre[246], il se soumit cependant, et l'on a eu depuis tout le loisir de se convaincre que l'opposition du supérieur était véritablement fondée sur le besoin que la maison avait de M. Caris. Le succès extraordinaire avec lequel il en a gouverné le temporel pendant plus de cinquante ans, et les bénédictions que Dieu a répandues sur son économie sont une preuve qu'il[247] lui était réservé d'en être le soutien, le père nourricier, et[248] d'agir à son égard comme un sage ministre de la Providence dans les différentes traverses qu'elle a eu à essuyer. Elle n'a cessé et ne cesse encore de bénir le moment où l'obéissance l'emporta sur son zèle. Pour lui, il ne se consola de n'avoir pu être disciple de M. de Montfort que par son attention[249] à lui en procurer. Voici comme il s'en explique lui-même aux sujets qu'il envoyait à sa communauté :
«Vous êtes heureux, disait-il à l'un d'eux, mon enfant et que j'ambitionne votre sort ! Que ne m'est-il permis de partir avec vous, ou d'aller dans votre place ! J'ai toujours soupiré après cette sainte mission. Je l'ai souvent demandée. J'avais même été choisi pour y aller, et j'étais sur le point de mon départ, lorsque mes péchés vinrent à la rencontre. »
 
Il répète la même chose à un autre qui le consultait «Allez, mon cher / 133/ enfant, partez sans délai pour le Poitou, vous y ferez beaucoup de bien. Allez-y occuper ma place ; car je devais y aller. Déjà le bréviaire[250] sous le bras et le bâton à la main, je partais pour aller avec M. de Montfort, lorsque k le supérieur m'arrêta tout court. Il n'y a que l'obéissance qui m'a toujours retenu et qui me retient encore ici.»
 
C'est ainsi qu'il les encourageait tous. Il mourut en saint comme il avait vécu, le 21 juin 1757. On avait toujours remarqué en lui la plus parfaite soumission aux ordres de la divine Providence. Il la conserva jusqu'à la fin. Il n'eut jamais le visage si riant et si tranquille que dans les derniers jours de sa vie. Il les passa dans les entretiens les plus doux avec Dieu, prononçant sans cesse des passages de l'Ecriture sainte et surtout des psaumes.. Voici l'épitaphe qu'on a consacrée à sa mémoire
 
Hic jacet Petrus Caris
Pauper Sacerdos Servus Mariae
hujus seminarii
procurator.
Deo et proximo vixit : numquarn sibi.
Obiit 21 a junii 1757
Ora. Imitare.
 
M. de Montfort quitta donc Paris sans emmener avec lui de missionnaires de la communauté du Saint-Esprit. Mais outre M. Vatel qui a eu l'avantage de travailler avec lui, elle lui en a formé d'excellents, qui se sont associés à ses missions après sa mort. M. Boüic, supérieur de la maison, ne voulut point le laisser partir sans recevoir de sa main quelque[251] chose qui lui rappelât son souvenir, par la haute idée qu'il avait de sa vertu. Je lui demandai, m'a‑t-il dit lui-même, quelque marque de son amitié. Il me fit présent d'un petit crucifix, long comme le doigt, en me disant : «Voilà ce que j'ai de plus précieux au monde, je vous le donne», et M. Boüic m'ajouta que ce petit crucifix était tout usé par le fréquent usage que M. de Montfort en avait fait pour le baiser. /134/
 
125 ‑ Autres travaux de M. de Montfort à Paris
 
Le zèle du serviteur de Dieu, non plus que la réputation de sa sainteté ne furent pas renfermés dans la seule maison du Saint-Esprit. Un très vertueux prêtre qui fut toujours étroitement lié d'amitié avec lui, et qui se trouva à Paris en même temps, dit ce qu'on va lire. Je ne fais que le copier mot à mot : «Jamais homme ne fut sur la dévotion du rosaire un plus fidèle disciple de saint Dominique que M. de Montfort. Il[252] en recommandait à tout le monde la pratique, et il a fait lui-même confidence à quelqu'un de ses amis qu'il avait obtenu de Dieu, par l'entremise de la sainte Vierge, la conversion des pécheurs les plus obstinés. Il avait un livre des merveilles du saint rosaire. Il les expliquait avec une telle onction que tout le monde en était charmé. Je crois qu'il y a engagé plus de cent mille personnes. Pour moi, je fus témoin qu'étant venu à Paris il avait porté trois communautés, et un nombre prodigieux de gens du monde, et même de la première considération[253], entre autres un abbé distingué et docteur de Sorbonne, à réciter le rosaire tous les jours. Je ne finirais pas si je voulais rapporter toutes les peines qu'il s'est données à ce sujet.»
 
Quoiqu'il eût déterminé[254] de sortir incessamment de Paris pour retourner vers La Rochelle, il ne put se refuser aux instances que lui firent les religieuses de l’Ave Maria de leur donner une retraite. Il s'y porta avec d'autant plus de zèle qu'il s'agissait de développer les voies de la perfection à des vierges consacrées à Jésus-Christ sous les auspices de sa divine Mère. Il ne douta point que la parole de Dieu ne dût fructifier dans cette terre de bénédiction. Elles, de leur côté, prévenues par la réputation de sa sainteté et de sa dévotion envers la sainte Vierge, témoignèrent un désir extrême de l'entendre. L’attente /135/ fut remplie de part et d'autre, et la satisfaction réciproque. Il est vrai que quelques-unes de ces bonnes filles, qui ne connaissaient M. de Montfort que par ce qu'elles avaient entendu dire de l’austérité de sa vie et de ses foudroyantes prédications, craignirent d'abord qu'il ne jetât le trouble dans leur conscience et hésitèrent à lui parler de leur intérieur ; mais elles furent bientôt détrompées. Elles virent qu'il n'y avait rien d'outré dans ses discours ; qu'il prêchait les grandes vérités sans y rien mêler d'étranger à ce que la foi nous oblige de croire ; que s’il parlait de la justice de Dieu de la manière la plus propre à inspirer la crainte, il n'oubliait pas de faire sentir[255], avec les expressions les plus touchantes, l'infinie étendue[256] de ses miséricordes ; qu'il fallait bien que toutes[257] ses exhortations fûssent proportionnées aux besoins et aux caractères des personnes à qui il parlait, puisqu'il ne leur disait à elles que ce qui convenait à leur état ; qu'il semblait même discerner leurs sentiments les plus intimes, et lire mieux qu'elles-­mêmes dans le fond de leur âme ; que la parole de Dieu était dans sa bouche une manne céleste accommodée. à tous les goûts ; qu'à l'exemple de saint Paul il ne parlait que sagesse avec les parfaits (I Corinth. II, 6), et que s'il paraissait[258] quelquefois, comme le même apôtre, moins réservé et moins sage, il y était contraint par la nécessité des conjonctures, et que le reproche n'en devait tomber que sur ceux qu'il avait à reprendre et à instruire (II Corinth. XII, 11 ). Que sa morale n'était ni relâchée ni trop sévère ; qu'il était à la vérité très exact, mais que son penchant tournait toujours vers la clémence ; qu'après avoir effrayé[259] le pécheur dans la chaire, il savait le consoler dans le tribunal de la réconciliation, compatir à ses faiblesses et le ramener à ses devoirs, moins par l'impression de la crainte que par l'attrait et le charme de sa douceur. Les premières qui le consultèrent le firent bientôt connaître dans toute la communauté. Sa réputation et une pieuse curiosité avaient préparé la voie à l'efficace de ses discours. La confiance leur donna tout un autre poids. On l'écouta comme un envoyé de Dieu ; ses décisions remirent la paix /136/ dans les consciences ou produisirent la réforme, et la retraite eut tout le succès qu'on pouvait en attendre.
 
Il restait aux religieuses à témoigner leur reconnaissance au pieux missionnaire, Elles connaissaient[260] son désintéressement ; mais enfin elles ne voulaient pas que la peine qu'il avait prise pour elles demeurât sans retour. Leur embarras fut pour imaginer ce qu'elles lui donneraient, et les sentiments furent partagés. Elles savaient qu'une personne de piété lui ayant fait faire une soutane, il l'avait changée avec un pauvre prêtre pour une qui était vieille et rapiécée, disant qu'une soutane neuve convenait mieux à ce prêtre qu'à lui. Qu'une autre fois, ayant reçu un chapeau il l'avait donné à un pauvre garçon et avait pris le sien ; qu'en[261] 1704, lorsqu'il devait partir de Paris, on lui avait[262] compté dix écus pour faire son voyage et que dans le moment[263] il en avait gratifié un pauvre gentil homme, ne voulant pour lui-même d'autre ressource que les fonds de la Providence. On craignait donc que sa charité ne le dépouillât bien vite du présent qu'on pensait à lui faire. Chacune[264] disait son avis, et la difficulté restait toujours. L'une d'entre elles trouva un expédient, et dit qu'il fallait donner au saint prêtre quelque chose qui fût tellement[265] conforme à son état et propre à son usage qu'elles seraient comme assurées qu'il ne s'en déferait point, qu'à cet effet il n'y avait qu'à lui faire un ornement pour dire la sainte messe. La découverte leur parut heureuse et sur le champ on commença l'ouvrage. C'était à qui serait reçue pour y travailler, chacune ambitionnant d'employer son talent pour le ministre de Jésus-Christ. L'ornement[266] fut bientôt conduit à sa perfection. Le saint homme[267] l'accepta, et c'est[268] celui dont fi se servit le reste de sa vie dans le cours de ses missions.
 
Nous avons dit que Madame de Mailly, qu'il avait convertie à La Rochelle, s'était retirée à Paris. Elle eut la consolation de l'y voir, et fut témoin /137/ d'un événement bien propre à la confirmer dans la créance à laquelle il l'avait ramenée et à[269] augmenter la profonde vénération dont elle[270] était pénétrée pour sa personne. Un jour qu'il sortait de dire la messe chez les religieuses de l'Adoration Perpétuelle du saint Sacrement, une femme du faubourg Saint-Germain qui s'y[271] était rendue, attirée par la réputation de sa sainteté, sortit après lui[272] de l'église et le suivit dans la rue. Elle tenait par la main un de ses enfants dont la tête était rongée de teigne, qui avait déjà formé une plaie considérable. Ne sachant plus quel remède lui faire, elle s'adressa au saint prêtre, toute éplorée, le priant de vouloir bien s'intéresser auprès de Dieu pour la guérison de son fils[273]. Il s'arrêta[274] et lui dit : «Croyez-vous que les ministres de Jésus-Christ aient le pouvoir de guérir, au nom de leur Maître, les différentes maladies et d'imposer les mains ? » ‑ «Oui, Monsieur, répondit cette femme, je le crois, et je suis persuadée que si vous demandez à Dieu sa guérison[275] elle vous sera accordée.» Dans le moment M. de Montfort imposa la main[276] sur la tête de l'enfant, et dit : «Que le Seigneur vous guérisse[277] et récompense en vous la foi de votre mère.» Dans l'instant la teigne sécha, tomba, et l'enfant fut parfaitement guéri. Après quoi M. de Montfort se retira promptement, pour éviter les démonstrations de respect et de vénération que cette action merveilleuse lui eût attirées.
Il ne tarda plus à se disposer à partir de Paris où il avait passé plus de deux mois, et où il avait terminé la grande affaire pour laquelle il y était allé, savoir son union avec messieurs du Saint-Esprit pour avoir des missionnaires.

TABLE DES MATIERES
 
Avant‑propos                                                                                                          V
 
MANUSCRIT du Père BESNARD
 
Première partie
 
 
Manuscrit
Edition 1981
 
cayer
page
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Avant-propos
 
 
 
V
Offrande à Jésus-Christ
1
1’
 
1
Avertissement
 
3’
 
4
Raisons personnelles de l'auteur d'écrire cette vie
 
3’
1
4
Garanties d'exactitude
 
3’
2
5
La difficulté du sujet
 
4’
3
5
L'auteur entend prouver que la conduite de M. Grignion n'est pas contraire à l'esprit de Sagesse
 
5’
4
7
Conduite extraordinaire et desseins de M. Grignion
 
7’
5
11
Tout près du peuple
 
9’
6
14
Précis final
 
9’
7
15
Les Etablissements de M. de Montfort
 
10’
8
16
En conclusion
 
10’
9
17
           
Livre Premier
 
La vie de Messire Louis-Marie Grignion de Montfort
 
11’
 
19
Les premières inclinations
 
11’
1
20
Au collège de Rennes
 
12’
2
21
Un talent naturel pour le dessin
 
12’
3
22
Précepteur de ses frères
 
13’
4
22
Ecclésiastiques amis
 
13’
5
23
Congréganiste
 
13’
6
23
Ses austérités. Sa bonté pour les autres
 
14’
7
24
L'estime de son entourage
 
15’
8
25
Mauvais traitement de la part de son père
 
15’
9
26
Il a connaissance des séminaires de St-Sulpice
 
16’
10
27
Le voyage à Paris
 
16’
11
28
L'usage qu'il fait de ses yeux
 
17’
12
29
Il entre dans la communauté de M. de la Barmondière
 
17’
13
29
Tout mon appui est sur Dieu
 
18’
14
30
Veilleur de morts et quêteur
 
18’
15
31
Direction de M. de la Barmondière
 
19’
16
32
Mort de M. de la Barmondière
 
21’
17
35
Lettre à M. de la Viseulle
 
21’
18
37
A la communauté de M. Boucher
 
22’
19
37
M. Grignion entre au petit St-Sulpice
 
22’
20
38
L'esprit d'oraison de M. Grignion
 
23’
21
40
Lectures de Boudon, Si Bonaventure; cantiques
 
24’
22
41
Le «singulier» chez M. Grignion
2
25’
23
43
La direction de M. Leschassier
 
25’
24
45
Le rôle de M. Brenier
 
26’
25
46
M. Grignion est nommé maître des cérémonies
 
27’
26
47
Pèlerin à Chartres
 
27’
27
48
L'auteur justifie les directeurs de St-Sulpice
 
28’
28
50
M. Grignion est ordonné prêtre
 
29’
29
51
L'embarras de choisir sa route
 
29’
30
52
A la communauté de M. Lévêque
 
30’
31
53
Eloge de M. Lévêque
 
30’
32
54
Visite de M. Grignion à Fontevrault
 
31’
33
55
Rencontre avec les pauvres de Poitiers
 
32’
34
58
Aumônier à l’Hôpital Général de Poitiers
 
33’
35
60
A Paris
 
34’
36
60
Chez les ermites du Mont-Valérien
 
37’
37
64
M. Grignion retourne à Poitiers
 
38’
38
66
La première Sagesse
 
40’
39
70
Action héroïque de M. Grignion
 
40’
40
71
Mademoiselle Louise Trichet
 
41’
41
73
Suppression de la première Sagesse
 
43’
42
75
Monsieur Grignion se retire
 
43’
43
76
 
Livre second
 
Son programme
 
44’
44
77
La mission de Montbernage
 
44’
45
78
Vocation de frère Mathurin
 
45’
46
80
La mission du Calvaire
 
46’
47
81
L'intervention du grand vicaire
 
47’
48
83
Mission de Saint-Saturnin
 
49’
49
86
Les Filles de la Sagesse à Poitiers
 
50’
50
89
Retraite à Sainte-Catherine et interdit
 
51’
51
91
Comment M. Grignion reçut l'interdit
 
53’
52
93
Lettre aux habitants de Montbernage et autres
 
53’
53
94
Le voyage à Rome
 
57’
54
99
L'audience de Clément XI
 
58’
55
102
                       
Deuxième partie
 
Pèlerinage à N.‑D. de Saumur et au Mont-Saint-Michel
3
1
56
104
Rencontre avec sa famille à Rennes
 
3
57
107
A Dinan, rencontre avec son frère dominicain
 
5
58
110
M. Grignion s'unit à M. Leuduger
 
9
59
116
A Saint-Lazare
 
11
60
120
Mission à La Chèze
 
12
61
122
La foire de La Chèze
 
14
62
125
Retraites à Saint-Brieuc
 
17
63
129
Mission de Moncontour
 
23
64
139
M. Grignion encourt la disgrâce de M. Leuduger
4
24
65
141
Livre troisième
 
Mission à Saint-Jean de Montfort
 
26
66
145
Le projet d'un Calvaire à Montfort échoue
 
27
67
147
Pouvoirs retirés puis rendus à M. Grignion
 
28
68
149
M. de Montfort en danger d'être tué
 
30
69
151
Avant de quitter Saint-Lazare M. de Montfort y établit une gardienne
 
30
70
152
M. Grignion prend sa route vers Nantes
 
32
71
154
La mission de Saint-Similien
 
32
72
155
La mission de Valette
 
36
73
161
Mission de la Chevrolière
 
37
74
163
La mission de Vertou
 
41
75
169
La guérison du frère Pierre
 
41
76
170
La mission de Saint-Fiacre
 
42
77
171
La mission de Cambon
 
43
78
172
La mission de Crossac
 
46
79
178
La mission et le calvaire de Pontchâteau
 
48
80
180
Liste des missions aux environs
5
49
81
183
La mission de Bouguenais
 
50
82
184
Description du Calvaire
 
51
83
185
La bénédiction manquée du Calvaire
 
52
84
187
M. de Montfort en retraite chez les Pères jésuites
 
54
86*
manca l’85
191
L'hospice de la rue des Hauts-Pavés
 
56
87
194
M. de Montfort fait profession dans le Tiers-Ordre de saint Dominique
 
57
88
196
Le débordement de la Loire
 
58
89
197
Témoignage de l'évêque de Nantes en faveur de M. de Montfort
 
59
90
200
                                   
Livre quatrième
 
Mission à La Garnache
 
59
91
201
La mission manquée de Loulay
 
60
92
203
Visite à des religieuses à Fontevrault
 
63
93
208
M. de Montfort à Luçon
 
64
94
210
En extase pendant sa messe
 
65
95
211
Le sermon à la cathédrale
 
66
96
213
Arrivée à La Rochelle
 
67
97
214
Premières prédications
 
67
98
216
Mission à L'Houmeau et trois autres en ville
 
68
99
217
M. de Montfort préfère le rosaire à la controverse
 
69
100
219
La conversion de Madame de Mailly
 
70
101
220
Au danger de sa vie
 
71
102
223
Calomnié et justifié
 
73
103
225
Projet d'assassinat
6
75
104
228
Tentative d’empoisonnement
 
77
105
231
La mission des soldats
 
77
106
232
Les croix en l'air
 
79
107
235
Voyage et mission à l'Ile D'Yeu
 
79
108
236
La mission de Salertaine
 
84
109
245
La mission au Ligneron
 
92
110
258
 
Livre cinquième
 
M. de Montfort revient à La Rochelle
 
97
111
267
La gageure de Mademoiselle Pagé
 
98
112
268
L’association des Sœurs de la Croix
7
99
113
271
Motif de fondation de la Compagnie de Marie
 
100
114
273
Le Séminaire du Saint-Esprit à Paris
 
101
115
274
La Prière Embrasée
 
108
116
284
Reprise des missions
 
110
117
287
La mission d'Esnandes
 
111
118
289
Mission dans une paroisse qui n'est pas nommée
 
114
119
295
La Règle de la Compagnie de Marie
 
117
120
299
Mission à la Séguinière
 
121
121
305
Voyage à Paris
8
124
122
309
La vocation de M. Le Valois
 
130
123
318
M. Caris et les missions
 
131
124
320
Autres travaux de M. de Montfort à Paris
 
134
125
323
 


[1]
1er texte : un mot barré, illisible
[2]
1er texte : il n'en voulut jamais accepter ; en surcharge : d'autre
[3]
1er texte : il trouva en effet
[4]
1er texte : La retraite qu lit se disposait à donner aux hospita­lières lui parut une occasion favorable... ; puis, en surcharge : ce fut pour les affermir de plus en plus, qu'il voulut que tout le monde fût admis (un mot barré, illisible)...
[5]
1er texte : dans les intrigues et. En surcharge un mot barré, illisible
[6]
1er texte : mondainement, barré, puis repris en surcharge
[7]
1er texte : Tout le monde et elle-même s'attendaient
[8]
1er texte : plusieurs mots barrés, dont seul le dernier : quelque est lisible, formaient un premier texte remplacé par ce dernier membre de phrase.
[9]
1er texte : ici
[10]
1er texte : de s'impatienter, de l'attendre, et ne partit
[11]
1er texte : lui demande où dem...
[12]
1er texte : lui ordonne
[13]
1er texte : Elle resta d
[14]
1er texte : pour demander à l'abbesse de la recevoir
 
[15]
1er texte : La relig.
[16]
1er texte : une ferveur qui répondit au
[17]
1er texte : que de la courageuse pénitente et
[18]
1er texte : portaient la persuasion
[19]
1er texte : et une juste confiance
[20]
1er texte : Mais tandis (en surcharge : pendant) qu'il travaillait
[21]
1er texte : Ce fut dans cet esprit qu'if établit à La Rochelle, ainsi qu'il avait déjà fait en plusieurs endroits
[22]
1er texte : sous le titre de la croix
 
[23]
1er texte : Mais ce qui l'occupait le plus
[24]
1er texte : Au milieu de tant de succès, il n'oubliait pas les pauvres habitants des (d'abord : de la) campagne
[25]
1er texte : il savait
[26]
1er texte : il pensait à en former
[27]
1er texte : promettre un
[28]
1er texte : la connaissance même
 
[29]
1er texte : nombre, d'abord barré puis repris en surcharge ; quelques bons, barré, et en surcharge : de dignes
[30]
1er texte : qui voulussent s'associer à
[31]
1er texte : dont les premiers ont
[32]
1er texte : un mot barré, illisible
[33]
1er texte : qu'il avait depuis longtemps lui-même
[34]
1er texte : avec la respectable institution du séminaire du Saint-Esprit
[35]
1er texte : Ce n'est donc point
[36]
1er texte : que de parler ici
[37]
1er texte : son origine
[38]
1er texte : M. de Mont(fort)
[39]
1er texte : il connut clairement ; en 'surcharge : l’éclaira,   barré, puis repris
[40]
1er texte : pour lui
 
[41]
1er texte : Cependant, l'union sainte
[42]
1er texte : entre lui et M. Grignion et lui
[43]
1er texte : un mot barré, illisible
[44]
1er texte : annonçait par avance
[45]
1er texte : choisis l'un et l'autre
[46]
1er texte : d’en venir à l’exécution
[47]
1er texte : était né, barré, puis repris en surcharge ; pour ainsi (dire), barré, et en surcharge : ce semble
[48]
1er texte : de l'aider
 
[49]
1er texte : un autre dessein
[50]
1er texte : celui, barré, et remplacé par : le premier, barré à son tour, puis repris : celui
[51]
1er texte : j'en connais
[52]
1er texte : sous le nouveau maitre
[53]
1er texte : où l'on se trouvât
 
[54]
1er texte : et qu'il fit
[55]
1er texte : Il leur faisait souvent; puis : il ne se borna (it)
[56]
1er texte : M. de Montfort; puis : M. Grignion
[57]
1er texte : Celui qui fut... m'a dit
[58]
1er texte : et qu'on y goûte
 
[59]
1er texte : m'ajouta‑t-il
[60]
1er texte : mais il la fit
[61]
1er texte : extrêmes, sans jamais arracher une plainte de sa bouche
* Le manuscrit porte (Psal. 83 vv. 1)
[62]
1er texte : leurs dignes supérieurs
 
[63]
1er texte : de lui rend(re)
[64]
1er texte : Faut-il être enseveli... hôpital ?
[65]
1er texte : Faut-il instruire... communauté ?
[66]
1er texte : Faut-il se transporter... résidence ?
[67]
1er texte : Faut-il même... Jésus-Christ ?
[68]
1er texte : d'excellents missionnaires
[69]
1er texte : sur lesquels
[70]
1er texte : Le saint homme
[71]
1er texte : soliloque que nous avons encore (comme correction en surcharge : conservons) écrit de sa main puis : à la tête de
[72]
1er texte : du prophète
 
[73]
1er texte : et ajoute : memento
[74]
1er texte : mirabilia, sentiamus adjutorium brachii tui
[75]
1er texte : sicut nubes
[76]
1er texte : Alioquin moriar, remplacé en surcharge par : Si je n'avais...
[77]
1er texte : S'il y met
[78]
1er texte : un règlement conforme
[79]
1er texte : mot barré illisible
[80]
1er texte : L'homme de Dieu
[81]
1er texte : qu'il regardait la voix
[82]
1er texte : ne pens(a)
[83]
1er texte : Cette phrase remplace une liste de noms de paroisses, où sont encore lisibles les noms : Esnandes, Courson, La Séguinière, Angoulin, La Jarrie, Saint-Christophe, Verrines, Saint-Médard, L’Ile d'Olé (ron)
[84]
1er texte : qu'il avait (faites)
[85]
1er texte : en
[86]
1er texte : des villages presqu'entiers
[87]
1er texte : oublier les
[88]
1er texte : ceux‑mêmes qui ne pouvaient l'entendre
[89]
1er texte : et attendris par les marques
[90]
1er texte : dont étaient, puis : paraissaient, puis en surcharge : étaient pénétrés
[91]
1er texte : qui se trouvaient
[92]
1er texte : un nombre infini
[93]
1er texte : le saint missionnaire
[94]
1er texte : que d’occuper plus longtemps un prêtre toujours disposé à se prêter aux besoins
[95]
1er texte : un long éloignement
[96]
1er texte : la plus grande partie
[97]
1er texte : Les sou(pirs)
[98]
1er texte : Une constante persévérance
[99]
1er texte : dans les lieux
 
[100]
1er texte : le précédait dans
[101]
1er texte : aux nouveaux prodiges
[102]
1er texte : sont
[103]
1er texte : jour consacré
[104]
1er texte : qu'ils firent
 
[105]
1er texte : se transporta
[106]
1er texte : ne firent qu'irriter
[107]
1er texte : lui firent, barré, puis repris en surcharge
[108]
1er texte : Le misérable
[109]
1er texte : de révoquer l'arrêt, barré, puis en surcharge : de demander à Dieu
[110]
1ertexte : des autres de sa famille
 
[111]
1ertexte : eut aussi part à son châtiment
[112]
1ertexte : couraient chercher
[113]
1er texte : et avoir
[114]
1er texte : Leur postérité
[115]
1er texte : qu'un f (fils)
[116]
1er texte : que nous nous sommes
[117]
1er texte : ces victimes publiques
[118]
1er texte : Ce fut pendant cet intervalle d'un saint repos que, livrant son âme aux douceurs de la contemplation, il y passait (en surcharge : employait) presque toutes les heures du jour et de la nuit. Mais si Dieu lui faisait ainsi éprouver les goûts sensibles et les délices ravissantes de son saint amour, ce n'était qu'après les lu! avoir fait acheter par les croix les plus rudes. Il aimait à se les rappeler pour en réitérer l'offrande. Il en parle avec une espèce de transport dans une lettre qu'il écrivit alors à se sœur, religieuse au couvent de l’Adoration Perpétuelle à Rambervilliers, en Lorraine. Elle est dotée du 1er janvier 1713.
 
Un premier texte suivant immédiatement 1713, portait : «Dieu, repris en alinéa. «Dieu prend plaisir, ma chère soeur, à nous voir combattre et à nous rendre tous deux victorieux, vous dans le secret et moi dans le public. Car, vos combats se passent dans vous-même et n'éclatent pas hors de votre communauté, mais les miens éclatent… soit à combattre les démons d`enfer soit à faire la guerre au monde et aux mondains, ennemis de toute vérité. Vous seriez sans doute surprise si vous saviez le détail de l'aimable croix dont le ciel me favorise, par l'intercession de notre bonne Mère. Je vous prie d'en remercier mon aimable Jésus, et de prier votre communauté, que je salue, de m'obtenir de Jésus crucifié la force de porter les plus rudes croix et les plus pesantes comme des pailles, et de résister avec un front d'airain aux puissances infernales. »
[119]
1er texte : On pense aisément avec quelle sainte ardeur il profits d'un repos
[120]
1er texte : renoncer à, puis : sacrifier un repos
[121]
1er texte : et reprendre
[122]
1er texte : et leur
[123]
1er texte : un mot barré, illisible
[124]
1er texte : fissent sur lui aucune impression
[125]
1er texte : à quoi rien ne résiste.
[126]
1er texte : si contraire
 
[127]
1er texte : tout le peuple
[128]
1er texte : un mot barré, illisible
[129]
1er texte : vous vous prévient
[130]
1er texte : plusieurs mots barrés, illisibles, puis : pour
[131]
1er texte : vous devez à son
[132]
1er texte : Ces lignes remplacent le premier te «Eh ! quoi, mes frères, voilà votre pasteur qui vous demande pardon... et vous, qui avez vomi contre lui mille calomnies, mille calomnies (en surcharge : malédictions), vous ne réconcilierez pas avec lui, vous ne... Les derniers mots : avec lui, vous ne furent barrés, et un point d’interrogation fut ajouté après : pas.
[133]
1er texte : de tous côtés
[134]
1er texte : était une réponse plus
[135]
1er texte : du saint prédicateur, barré, puis répété
[136]
1er texte : C'est ainsi qu'il savait
 
[137]
1er texte : il fallut décider
[138]
1er texte : une juste sentence
[139]
1er texte : la consolation de rétablir l'union et la tranquillité dans
[140]
1er texte : M. le curé
[141]
1er texte : La mission d’Esnandes
[142]
1er texte : de sa direction qu'il devint lui-même un parfait modèle ; puis, en surcharge : de la direction de ce grand maître dans la vie intérieure et ecclésiastique, qu'il en devint lui-même un parfait modèle
[143]
1er texte : de ce saint homme
 
[144]
1er texte : un mot illisible, avec en surcharge : ce
[145]
1er texte : qu'il y faisait ; les deux dernières syllabes de intermédiaires ont été barrées, puis reprises en surcharge.
[146]
1er texte : nous le dirons ci-après
[147]
1er texte : Ce plan est si sage et si parfait
[148]
1er texte : que le lecteur me saura bon gré
[149]
1er texte : Il porte
[150]
1er texte : le saint instituteur
[151]
1er texte : éprouvé
[152]
1er texte : cependant pas
[153]
1er texte : faisant
 
[154]
1er texte : « Voilà... »
[155]
1er texte : préférer ordinairement préférer
[156]
1er texte : en établissant de leur mieux
[157]
1er texte : un mot barré, illisible, avec : cependant en surcharge
[158]
1er texte : qui le lui avait inspiré lui
[159]
1er texte : une étroite liaison, puis en surcharge: la même
[160]
1er texte : depuis la mort de M. Desplaces, comme il (un mot barré, illisible)
 
[161]
1er texte : un mot barré, illisible
[162]
1er texte : une nouvelle méthode
[163]
1er texte : trop de crainte
[164]
1er texte : ne les mette
[165]
1er texte : qu'on
[166]
1er texte : désirait la, puis : une mission avec
 
[167]
1er texte : de voir leur peuple donner à
[168]
1er texte : plus nombreuse
[169]
1er texte : enfin il se fit
[170]
1er texte : de voir
[171]
1er texte : un ou deux mots barrés, illisibles et en surcharge : que
[172]
1er texte : où elle ét (ait)
[173]
1er texte : qu'il croyait, avec: ne, en surcharge, et : croyait, repris
[174]
1er texte : plusieurs mots barrés, illisibles avant ‑ en particulier
[175]
1er texte : les, barré, puis repris
 
 
[176]
1er texte : tous les jours de (un mot illisible, puis) : prière si excellente, si sainte
[177]
1er texte : C'est donc en même temps
[178]
1er texte : traces de mots barrés, illisibles sur le feuillet troué
[179]
1er texte : Nous en faisons tous les jours l'heureuse expérience
[180]
1er texte : après (mission finie)
[181]
1er texte : profiter de l'offre q(ue)
[182]
1er texte : et il s'y trouvait
[183]
1er texte : Il, barré, puis repris en surcharge
[184]
1er texte : le feuillet troué garde trace d'un ou plusieurs mots barrés.
[185]
1er texte : Il en trouva
[186]
1er texte : mille contes
[187]
1er texte : et les sentiments de se reconnaissance
[188]
1er texte : ne cessait de lui rendre… saintes âmes
 
 
 
[189]
1er texte : comme, barré, puis repris en surcharge
[190]
1er texte : il (des lettres barrées en surcharge) était, dit-elle même (en surcharge : mademoiselle de La Vieu­ville elle-même) si éperdument amoureux des croix et des humiliations qu'il m'a obligée bien des fois à me mettre à genoux au parloir, comme il s'y mettait de son côté, pour demander pour lui et avec lui d'en être gratifié.
[191]
1er texte : un mot barré, illisible
[192]
1er texte : L'obéissante (non barré, mais corrigé en surcharge par : la pieuse) religieuse
[193]
1er texte : Le saint homme
[194]
1er texte : tous les lieux
[195]
1er texte : il s'en exprime
[196]
1er texte : ne me laissent
[197]
1er texte : poussée, barré puis repris en surcharge
[198]
1er texte : Jésus crucifié
[199]
1er texte : Héritiers des sentiments de feu
[200]
1er texte : du saint prêtre
[201]
1er texte : la source dont
[202]
1er texte : furent toujours
[203]
1er texte : les actions
[204]
1er texte : la vraie sainteté de celle
[205]
1er texte : les œuvres
 
[206]
1er texte : dans les plus grands
[207]
1er texte : qu'il qu'il, répétition non barrée
[208]
1er texte : Aussi plein de (un mot barré, illisible) pour eux qu'ils étaient pénétrés de respect et d'estime pour lui
[209]
1er texte : Il leur donna lecture de
[210]
1er texte : dans cette sainte carrière
[211]
1er texte : de remplir
[212]
1er texte : pour mieux les
[213]
1er texte : Il voulut conserver
[214]
1er texte : un mot barré, illisible
[215]
1er texte : une si sainte œuvre. A la suite du texte actuel : et d' (un mot barré, illisible)
[216]
1er texte : d'en(viron)
[217]
1er texte : d'un grand manteau
[218]
1er texte : qui nous attache
[219]
1er texte : que les premiers se font
[220]
1er texte : d'employ(er)
[221]
1er texte : à no(tre)
[222]
1er texte : de la sainte Vierge
[223]
1er texte : qui lui est spécialement dévouée
[224]
1er texte : nous faisons gloire
[225]
1er texte : dont nous sommes
[226]
1er texte : pour soutenir sa gloire ; en surcharge : ses pri(vilèges)
[227]
1er texte : en notre pouvoir
[228]
1er texte : De part et d'autre, barré puis repris ; en surcharge : dans leurs et (suivi de lettres barrées, illisibles)
[229]
1er texte : un mot barré, illisible
[230]
1er texte : un mot barré, illisible
[231]
1er texte : les trois autres ne pu(rent)
[232]
1er texte : Cependant comme
[233]
1er texte : de si singulier ; puis : de si surprenant
[234]
1er texte : Tout ce passage, à partir de : Les premiers à qui…, a pris la place du texte primitif suivant : On se souvient encore à la communauté du Saint-Esprit des exhortations édifiantes qu’y faisait M. de Montfort. On se plait à en rapporter des traits. On nous en a récité à nous-mêmes, lorsque nous sommes allé voir nos chers et respectables associés. Nous ne les rapporterons pas ici ; le récit de ses actions nous fournit une trop vaste matière. Il est temps d’en reprendre le fil. Cette dernière phrase a été barrée, tandis qu'en surcharge ‑ pour continuer la phrase qui terminait par : une trop vaste matière... et pour être rattaché à la suite du texte, on lisait : et il doit nous suffire pour faire (suite du texte) voir combien ses, discours étaient touchants et persuasifs de rapporter la vocation de quatre clercs du nouveau séminaire, à qui ils inspirèrent le désir de se joindre à lui pour l'œuvre des missions.
[235]
1er texte : qu'il ne semblait
[236]
1er texte : que le saint missionnaire
[237]
1er texte : qu'on repard(ait)
[238]
1er texte : des prophètes
[239]
1er texte : il les fixa
[240]
1er texte : Il en forma le dessein
[241]
1er texte : au saint ministère ; puis : au ministère évangélique; puis : au ministère des autels
[242]
1er texte : les porta à se gêner
[243]
1er texte : qu'il y eût des sujets
[244]
  HANNO SALTATO LA NOTA MA IO HO MESSO IL NUMERO UGUALMENTE SE NO MI SALTAVA TUTTA LA NUMERAZIONE.
[245]
1er texte : fut pour M. Caris
[246]
1er texte : et étonna tout le séminaire
[247]
1er texte : qu'il devait
[248]
1er texte : et le ministre de la Providence
[249]
1er texte : que par son zèle
[250]
1er texte : lettres barrées, illisibles, puis : n'y a que
[251]
1er texte : quelque signe de
 
[252]
1er texte : il la recommandait
[253]
1er texte : de la première condition
[254]
1er texte : quoique le serviteur de Dieu eût déterminé
[255]
1er texte : il savait faire sentir
[256]
1er texte : toute l'étendue
[257]
1er texte : toutes, barré puis repris
 
[258]
1er texte : s'il paraissait une
[259]
1er texte : que s’il effrayait
[260]
1er texte : elles savaient
[261]
1er texte : qu'enfin
[262]
1er texte : on lui avait fait
[263]
1er texte : sur le champ
[264]
1er texte : Un (chacun)
 
[265]
1er texte : un mot barré, illisible
[266]
1er texte : L'ouvrage
[267]
1er texte : le serviteur
[268]
1er texte : et en fit
[269]
1er texte : et en
[270]
1er texte : vénération qu'elle
[271]
1er texte : qui y avait
[272]
1er texte : le suivit
[273]
1er texte : de son enfant
[274]
1er texte : deux mots barrés, illisibles, et en surcharge : il s'arrêta
[275]
1er texte : la guérison de mon enfant
[276]
1er texte : les mains
[277]
1er texte : vous guérisse, mon enfant
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